Matthieu 25, 24
Celui qui avait reçu un seul talent s’approcha aussi et dit : “Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain.
Celui qui avait reçu un seul talent s’approcha aussi et dit : “Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain.
2548. VINT ENFIN CELUI QUI N’AVAIT REÇU QU’UN SEUL TALENT, ET IL DIT. Ici est précisé le jugement du mauvais serviteur. Premièrement, une justification est présentée ; deuxièmement, la condamnation qu’il reçoit, en cet endroit : MAIS SON MAÎTRE LUI RÉPONDIT [25, 26].
2549. [Ce serviteur] a présenté une justification étonnante. En effet, il a d’abord exprimé un blasphème ; à cause de cela, il est tombé dans la négligence ; troisièmement, il en conclut à son innocence. Mais un tel syllogisme n’était pas valable. [Il exprime] un blasphème lorsqu’il dit : MAÎTRE, JE SAIS QUE TU ES UN HOMME DUR. [Il est tombé dans] la négligence lorsqu’il dit : JE SUIS ALLÉ CACHER TON TALENT, etc. [Il conclut à] son innocence lorsqu’il dit : VOICI CE QUI T’APPARTIENT. Remarquons que [le Seigneur] dit qu’IL S’APPROCHA. Il a été dit plus haut de celui qui avait reçu cinq talents qu’il s’approcha, c’est-à-dire qu’il avait confiance. Mais celui-ci ne s’est pas approché avec confiance, mais avec violence. Ou bien, [autre interprétation] : certains, lorsqu’ils agissent mal, semblent en tirer profit. Pr 26, 16 : Le paresseux semble plus sage à ses propres yeux que sept hommes qui parlent avec sagesse. Il lui avait donc semblé qu’il avait bien agi. Selon Origène, il semble qu’il s’agisse de celui qui pense que Dieu est dur comme un homme dur, en raison de quoi il s’en éloigne à cause de la dureté. Si 9, 18 : Reste loin de l’homme qui a le pouvoir de tuer. De même donc que celui qui sait qu’un homme est dur ne veut pas le servir, de même certains pensent-ils de Dieu qu’il est un homme dur.
2550. Sur ce point, ce serviteur partageait trois opinions inexactes au sujet de Dieu : la première, que Dieu n’est pas miséricordieux ; la deuxième, qu’on pourrait lui ajouter quelque chose par nos biens ; la troisième, que tout ne vient pas de Dieu. Et toutes ces opinions inexactes venaient d’une seule source mauvaise : il pensait que Dieu était comme un homme. Cela est indiqué lorsqu’il dit : JE SAIS QUE TU ES UN HOMME DUR, c’est-à-dire : «Je pense que tu es un homme», ce qui n’est pas vrai, comme on le lit en Nb 23, 19 : Dieu n’est pas comme l’homme. Is 55, 9 : Comme les cieux sont supérieurs à la terre, ainsi mes sentiers dépassent-ils vos sentiers. Et [le serviteur] dit DUR, parce qu’un homme dur ne plie pas. Jb 41, 15 en dit : Son cœur s’endurcira comme l’enclume sous les coups du marteau. Mais le Seigneur n’est pas ainsi, car le Seigneur fait miséricorde et il est miséricordieux, Ps 110[111], 4.
2551. La dureté vient habituellement de l’avarice. Pr 29, 4 : Le roi juste relève le pays, [le roi] avare le détruira. [Le serviteur] estime donc que [le maître] est dur, et donc avare. Il lui attribue donc ce qui est le propre de l’avare : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, ET TU RÉCOLTES OÙ TU N’AS PAS RÉPANDU, c’est-à-dire que «tu es si dur que tu ne cesses de prendre ce qui appartient à un autre». Toutefois, cela est faux. Jb 35, 7 : Au surplus, si tu agis justement, que lui donneras-tu ou que recevra-t-il de ta main ? Et en Ps 15[16], 2 : Tu n’as pas besoin de mes biens. Il disait donc de Dieu qu’Il avait besoin de nos biens.
2552. La troisième [opinion] était qu’il existait un bien qui ne venait pas de Dieu, comme certains disent qu’ils ne tiennent pas de Dieu ce qu’ils possèdent comme patrimoine ou par suite de leurs efforts. C’est ce qu’il dit : LÀ OÙ TU N’AS PAS SEMÉ. S’oppose à cela Jc 1, 17 : Tout don excellent, ton don parfait vient d’en-haut et provient du Père des lumières. De même, certains, estimant qu’Il est dur, se retirent de son service. De sorte que certains, qui peuvent apporter beaucoup, disent : «Si j’entendais les confessions et prêchais, peut-être que cela tournerait mal pour moi.» Ceux-là disent que Dieu est dur. De même, certains disent : «Si j’entrais en religion, peut-être que je pécherais et serais plus mauvais.» Ceux-ci disent de Dieu qu’il est dur, qui croient que, s’ils s’attachaient à Dieu, Il leur ferait défaut. Ceux-là sont semblables à ceux qui désespèrent de la miséricorde de Dieu. C’est ce qu’alléguait ce serviteur.
2553. Et cependant, ces choses sont vraies et s’appuient sur une autorité. En effet, [Dieu] est dur envers les pécheurs et tendre avec ceux qui recourent à Lui. Sg 11, 11 : Comme un père qui avertit, tu as mis ceux-ci à l’épreuve ; comme un roi dur qui interroge, tu as condamné ceux-là. Lm 3, 25 : Le Seigneur est bon pour l’âme qui le cherche. 2 Ch 30, 18 : Le Seigneur dans sa bonté exaucera tous ceux qui cherchent de tout leur cœur le Seigneur, le Dieu de leurs pères. Il est donc dur envers les pécheurs et miséricordieux envers les bons. Et il n’est pas douteux qu’il doive être craint, de peur qu’on ne le méprise. Ainsi, He 10, 31 : Il est terrible de tomber entre les mains du Dieu vivant. Mais, comme il est miséricordieux, nous devons espérer que, si quelqu’un se donne à son service, il ne tombera pas, et s’il tombe, il se relèvera. De même, lorsque [le serviteur] dit : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, bien que cela soit faux, cela peut être vrai en un certain sens, car il n’exige pas pour lui-même, mais pour notre utilité. Il moissonne sa propre gloire qu’il n’a pas semée. De même, TU RÉCOLTES OÙ TU N’AS PAS RÉPANDU. En effet, celui qui moissonne prend largement ; mais celui qui récolte reçoit de plusieurs. Ainsi le Seigneur veut-il que sa gloire soit accrue par divers hommes. Aussi l’Apôtre [dit-il], 2 Co 1, 14 : Nous sommes votre gloire, comme vous êtes la nôtre, au jour de notre Seigneur Jésus, le Christ.
2554. De même, lorsqu’il dit : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, cela est vrai dans une certaine mesure, car l’homme sème et Dieu récolte. Jn 4, 37 : Autre est celui qui sème, autre celui moissonne. Je vous ai envoyés moissonner là où vous n’avez pas travaillé. En effet, l’homme sème ses œuvres, et Dieu récolte sa gloire. Ga 6, 8 : Ce que l’homme sème, il le récolte. Et le Seigneur dit, Jn 14, 3 : Je viendrai et je vous prendrai avec moi. En effet, si tu fais l’aumône, tu sèmes, et le Seigneur moissonne, car il considère peut-être que cela lui appartient. Aussi lui-même dit-il, plus loin dans ce chapitre : Ce que vous avez fait à l’un des plus petits des miens, c’est à moi que vous l’avez fait [Mt 25, 40]. De même, comme il a été dit plus haut : La semence est la parole de Dieu. Ainsi, Dieu recueille parfois les fruits d’une bonne œuvre là où la prédication n’a pas été semée. Rm 2, 14 : Les hommes qui n’ont pas de loi sont une loi pour eux-mêmes.
2555. Troisièmement, certaines choses mauvaises sont faites par l’homme, comme [les actions] mauvaises de la chair, dont le mal sera récolté. À ce propos, Ga 6, 8 [dit] : Celui qui sème dans la chair, récolte de la chair la corruption. Cependant, Dieu fait tourner cela en un certain bien, comme le bien de la justice, de l’humilité ou des choses de ce genre.
2549. [Ce serviteur] a présenté une justification étonnante. En effet, il a d’abord exprimé un blasphème ; à cause de cela, il est tombé dans la négligence ; troisièmement, il en conclut à son innocence. Mais un tel syllogisme n’était pas valable. [Il exprime] un blasphème lorsqu’il dit : MAÎTRE, JE SAIS QUE TU ES UN HOMME DUR. [Il est tombé dans] la négligence lorsqu’il dit : JE SUIS ALLÉ CACHER TON TALENT, etc. [Il conclut à] son innocence lorsqu’il dit : VOICI CE QUI T’APPARTIENT. Remarquons que [le Seigneur] dit qu’IL S’APPROCHA. Il a été dit plus haut de celui qui avait reçu cinq talents qu’il s’approcha, c’est-à-dire qu’il avait confiance. Mais celui-ci ne s’est pas approché avec confiance, mais avec violence. Ou bien, [autre interprétation] : certains, lorsqu’ils agissent mal, semblent en tirer profit. Pr 26, 16 : Le paresseux semble plus sage à ses propres yeux que sept hommes qui parlent avec sagesse. Il lui avait donc semblé qu’il avait bien agi. Selon Origène, il semble qu’il s’agisse de celui qui pense que Dieu est dur comme un homme dur, en raison de quoi il s’en éloigne à cause de la dureté. Si 9, 18 : Reste loin de l’homme qui a le pouvoir de tuer. De même donc que celui qui sait qu’un homme est dur ne veut pas le servir, de même certains pensent-ils de Dieu qu’il est un homme dur.
2550. Sur ce point, ce serviteur partageait trois opinions inexactes au sujet de Dieu : la première, que Dieu n’est pas miséricordieux ; la deuxième, qu’on pourrait lui ajouter quelque chose par nos biens ; la troisième, que tout ne vient pas de Dieu. Et toutes ces opinions inexactes venaient d’une seule source mauvaise : il pensait que Dieu était comme un homme. Cela est indiqué lorsqu’il dit : JE SAIS QUE TU ES UN HOMME DUR, c’est-à-dire : «Je pense que tu es un homme», ce qui n’est pas vrai, comme on le lit en Nb 23, 19 : Dieu n’est pas comme l’homme. Is 55, 9 : Comme les cieux sont supérieurs à la terre, ainsi mes sentiers dépassent-ils vos sentiers. Et [le serviteur] dit DUR, parce qu’un homme dur ne plie pas. Jb 41, 15 en dit : Son cœur s’endurcira comme l’enclume sous les coups du marteau. Mais le Seigneur n’est pas ainsi, car le Seigneur fait miséricorde et il est miséricordieux, Ps 110[111], 4.
2551. La dureté vient habituellement de l’avarice. Pr 29, 4 : Le roi juste relève le pays, [le roi] avare le détruira. [Le serviteur] estime donc que [le maître] est dur, et donc avare. Il lui attribue donc ce qui est le propre de l’avare : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, ET TU RÉCOLTES OÙ TU N’AS PAS RÉPANDU, c’est-à-dire que «tu es si dur que tu ne cesses de prendre ce qui appartient à un autre». Toutefois, cela est faux. Jb 35, 7 : Au surplus, si tu agis justement, que lui donneras-tu ou que recevra-t-il de ta main ? Et en Ps 15[16], 2 : Tu n’as pas besoin de mes biens. Il disait donc de Dieu qu’Il avait besoin de nos biens.
2552. La troisième [opinion] était qu’il existait un bien qui ne venait pas de Dieu, comme certains disent qu’ils ne tiennent pas de Dieu ce qu’ils possèdent comme patrimoine ou par suite de leurs efforts. C’est ce qu’il dit : LÀ OÙ TU N’AS PAS SEMÉ. S’oppose à cela Jc 1, 17 : Tout don excellent, ton don parfait vient d’en-haut et provient du Père des lumières. De même, certains, estimant qu’Il est dur, se retirent de son service. De sorte que certains, qui peuvent apporter beaucoup, disent : «Si j’entendais les confessions et prêchais, peut-être que cela tournerait mal pour moi.» Ceux-là disent que Dieu est dur. De même, certains disent : «Si j’entrais en religion, peut-être que je pécherais et serais plus mauvais.» Ceux-ci disent de Dieu qu’il est dur, qui croient que, s’ils s’attachaient à Dieu, Il leur ferait défaut. Ceux-là sont semblables à ceux qui désespèrent de la miséricorde de Dieu. C’est ce qu’alléguait ce serviteur.
2553. Et cependant, ces choses sont vraies et s’appuient sur une autorité. En effet, [Dieu] est dur envers les pécheurs et tendre avec ceux qui recourent à Lui. Sg 11, 11 : Comme un père qui avertit, tu as mis ceux-ci à l’épreuve ; comme un roi dur qui interroge, tu as condamné ceux-là. Lm 3, 25 : Le Seigneur est bon pour l’âme qui le cherche. 2 Ch 30, 18 : Le Seigneur dans sa bonté exaucera tous ceux qui cherchent de tout leur cœur le Seigneur, le Dieu de leurs pères. Il est donc dur envers les pécheurs et miséricordieux envers les bons. Et il n’est pas douteux qu’il doive être craint, de peur qu’on ne le méprise. Ainsi, He 10, 31 : Il est terrible de tomber entre les mains du Dieu vivant. Mais, comme il est miséricordieux, nous devons espérer que, si quelqu’un se donne à son service, il ne tombera pas, et s’il tombe, il se relèvera. De même, lorsque [le serviteur] dit : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, bien que cela soit faux, cela peut être vrai en un certain sens, car il n’exige pas pour lui-même, mais pour notre utilité. Il moissonne sa propre gloire qu’il n’a pas semée. De même, TU RÉCOLTES OÙ TU N’AS PAS RÉPANDU. En effet, celui qui moissonne prend largement ; mais celui qui récolte reçoit de plusieurs. Ainsi le Seigneur veut-il que sa gloire soit accrue par divers hommes. Aussi l’Apôtre [dit-il], 2 Co 1, 14 : Nous sommes votre gloire, comme vous êtes la nôtre, au jour de notre Seigneur Jésus, le Christ.
2554. De même, lorsqu’il dit : TU MOISSONNES OÙ TU N’AS PAS SEMÉ, cela est vrai dans une certaine mesure, car l’homme sème et Dieu récolte. Jn 4, 37 : Autre est celui qui sème, autre celui moissonne. Je vous ai envoyés moissonner là où vous n’avez pas travaillé. En effet, l’homme sème ses œuvres, et Dieu récolte sa gloire. Ga 6, 8 : Ce que l’homme sème, il le récolte. Et le Seigneur dit, Jn 14, 3 : Je viendrai et je vous prendrai avec moi. En effet, si tu fais l’aumône, tu sèmes, et le Seigneur moissonne, car il considère peut-être que cela lui appartient. Aussi lui-même dit-il, plus loin dans ce chapitre : Ce que vous avez fait à l’un des plus petits des miens, c’est à moi que vous l’avez fait [Mt 25, 40]. De même, comme il a été dit plus haut : La semence est la parole de Dieu. Ainsi, Dieu recueille parfois les fruits d’une bonne œuvre là où la prédication n’a pas été semée. Rm 2, 14 : Les hommes qui n’ont pas de loi sont une loi pour eux-mêmes.
2555. Troisièmement, certaines choses mauvaises sont faites par l’homme, comme [les actions] mauvaises de la chair, dont le mal sera récolté. À ce propos, Ga 6, 8 [dit] : Celui qui sème dans la chair, récolte de la chair la corruption. Cependant, Dieu fait tourner cela en un certain bien, comme le bien de la justice, de l’humilité ou des choses de ce genre.
La scène change soudain à l'approche du troisième esclave. Sentant bien, par l'accueil
fait aux autres, ce qu'il y a de faux dans sa situation, il essaie de pallier sa faute en alléguant de vaines
excuses. Mais il ne réussit qu'à l'aggraver par l'insolence de son maintien et de ses paroles. - Je sais que vous
êtes un homme dur. C'est là un impudent mensonge : mais tout est bon pour un coupable sans conscience et
sans délicatesse, qui veut échapper par n'importe quel moyen au châtiment qu'il sait avoir mérité. - A l'aide
de deux locutions proverbiales, ce misérable prétend développer et appuyer le reproche qu'il vient d'adresser
à son Maître. 1° Moissonner ce qu'on n'a pas semé, cela signifie « s'approprier le bien d'autrui », ou encore
« s'enrichir en se servant des travaux de ses semblables ». C'est ce second sens qu'il faut adopter ici, car le
mauvais serviteur n'accuse pas son maître d'injustice ni de vol, mais seulement de dureté. - 2° ramassez où vous n'avez pas répandu... La pensée est tout à fait la même, quelque soit du reste la signification du verbe
latin « sparsisti », au sujet de laquelle les exégètes sont depuis longtemps divisés. Les uns le traduisent par
« vanner », les autres par « semer » : nous admettons le premier sens, pour éviter une tautologie. - Après
avoir cité l'accusation de ce mauvais serviteur, Bossuet s'écrie, Médit. Sur l'Évang., dern. semaine, 90° jour :
« A Dieu ne plaise que Dieu soit ainsi ! Car où n'a-t-il pas semé et quels dons n'a-t-il pas répandus ? Mais
Jésus-Christ veut nous faire entendre par cette espèce d'excès combien est grande la rigueur de Dieu dans le
compte qu'il redemande. Car il n'y a rien qu'il n'ait droit d'exiger de sa créature infidèle et désobéissante, dont
le fonds étant à lui tout entier, il a droit de punir son ingratitude des plus extrêmes rigueurs. »