Matthieu 25, 41

Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : “Allez-vous-en loin de moi, vous les maudits, dans le feu éternel préparé pour le diable et ses anges.

Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : “Allez-vous-en loin de moi, vous les maudits, dans le feu éternel préparé pour le diable et ses anges.
Saint Thomas d'Aquin
2597. ALORS LE ROI DIRA À CEUX QUI SERONT À SA GAUCHE. Ici est présentée la condamnation des mauvais. Premièrement, la condamnation est présentée ; deuxièmement, leur justification ; troisièmement, leur réfutation.

À propos du premier point, il présente [d’abord] la sentence ; en second lieu, la peine.

2598. Il dit donc : ÉCARTEZ-VOUS DE MOI, MAUDITS. Cette sentence est différente de la première, car, dans la première, il disait : VENEZ, LES BÉNIS DE MON PÈRE ; mais ici, il ne dit pas : MAUDITS DE MON PÈRE, car notre bénédiction vient de Dieu, mais la malédiction vient de nous. En He 5 et Dt 23, 5, il change la bénédiction en malédiction. La différence est aussi que, plus haut, il a dit : PRENEZ POSSESSION DU ROYAUME PRÉPARÉ POUR VOUS, etc. ; mais ici, il dit : ALLEZ AU FEU ÉTERNEL QUI A ÉTÉ PRÉPARÉ POUR LE DIABLE ET SES ANGES. Pour quelle raison ? Origène dit qu’«il n’a pas donné de peines à cause des hommes, mais qu’eux-mêmes se donnent la mort de leurs propres mains». Is 31, 7 : En ce jour-là, l’homme rejettera les idoles faites avec son or et son argent, que vous aviez faites de vos propres mains. Mais quelqu’un peut dire : «Est-ce que le Seigneur n’a pas fait le Diable bon ?» Remarquez que le Seigneur parle de la préparation selon que celle-ci se manifeste aux origines du monde. Or, le Diable a péché dès l’origine. [Le Seigneur] n’a donc pas préparé [un feu éternel] pour l’Ange, qui, pour ce qui est de sa nature, a été créé bon, mais en raison du péché.

2599. J’AI EU FAIM. Ici, il n’y a rien d’autre à dire qu’il parle différemment aux bons et aux mauvais, car, plus haut, il a dit chaque chose explicitement, mais ici, il regroupe plusieurs choses. Ainsi, [il dit] : [J’ÉTAIS] MALADE ET EN PRISON. Et parce qu’il regroupe ces deux choses, il faut dire qu’il procède comme un bon juge qui condamne malgré lui et récompense généreusement. Ainsi, il amplifie les paroles de récompense et abrège [les paroles] de condamnation.
Louis-Claude Fillion
Nous arrivons à la terrible sentence des méchants, vv. 41-45. Dans ses divers détails, dans ses termes mêmes, elle est parallèle à la sentence des bons, ce qui en fait ressortir la triste différence. En effet, quoique semblables, les deux décrets sont complètement opposés l'un à l'autre, comme l'a été d'ailleurs la vie des hommes sur lesquels ils retombent. - Retirez-vous. Ce mot est le plus effroyable de tous ceux qui composent la seconde sentence : il implique de la part de Dieu la haine la plus vive pour ceux qu'il rejette ainsi, de même qu'il présente aux damnés la face la plus dure de leur châtiment. Aussi est-ce dans la séparation de Dieu que consiste essentiellement « la peine du dam », de même que le bonheur des élus consiste avant tout dans l'union éternelle avec Dieu. Écoutons Bossuet : « Au lieu de ce Venez si ravissant, plein d'une admirable douceur, qui satisfera le cœur de l'homme sans lui laisser rien à désirer, les méchants, les impénitents entendent cet impitoyable Allez, retirez-vous ! O paroles qu'on ne peut assez méditer : venez ! Allez ! Taisons-nous ; tais-toi ma langue, tes expressions sont trop faibles. Mon âme, pèse ces mots qui comprennent tout le bonheur et le malheur, et toute l'idée de l'un et de l'autre : Venez, allez. Venez à moi où est tout le bien. Allez loin de moi où est tout le mal ». Méditat. Sur l'Evang. Dern. Semaine, 93è et 97è jour. - Maudits, exécrés, dévoués irrévocablement à toutes les horreurs et à tous les supplices. Jésus avait appelé les justes « Bénis de mon Père » ; ici, il dit simplement : « Maudits ». Les Saints Pères ont noté la cause de cette omission volontaire d'un nom que le Sauveur aimait à prononcer. « Remarquez aussi que s'il a dit: «Les bénis de mon Père»,il ne dit pas ici: «Les maudits de mon Père»; car le Père est la source de toute bénédiction, mais chacun devient pour soi-même une cause de malédiction, en faisant des œuvres dignes de malédiction », Origène. Dieu ne sait que bénir : les maudits sont donc ceux qui se maudissent eux-mêmes. - Au feu. Après la peine du dam vient la peine des sens, dont l'agent principal sera le feu qui consumera les réprouvés, feu réel et proprement dit (voir le savant opuscule de Passaglia, de Aeternitate poenarum deque igne aeterno commentarii, Ratisb. 1854) quoique différent des nôtres à plusieurs égards ; en même temps feu éternel, comme le dit expressément Jésus. L'adjectif éternel doit en effet se prendre à la lettre : ce n'est pas une hyperbole populaire pour désigner un temps considérable, c'est une réalité terrible. - Qui a été préparé... Même réflexion qu'à propos du mot maudits. « Ce n’est point moi, dit-il, qui vous ai préparé ces feux. Je vous ai bien préparé un royaume, mais ces flammes n’étaient destinées par moi que pour le démon et pour ses anges. C’est vous seuls que vous devez accuser de votre malheur, et vous vous êtes précipités volontairement dans ces abîmes », S. Jean Chrys. Hom. 79 in Matth. Ce sont nos péchés et ceux des démons qui ont creusé l'enfer : Dieu n'en est pas le créateur d'une manière positive. - La mention de Satan et des autres esprits mauvais a aussi pour but de mieux faire comprendre l'étendue des peines de l'enfer, la présence de ces anges rebelles devant ajouter considérablement aux tourments des damnés.