Matthieu 26, 45

Alors il revient vers les disciples et leur dit : « Désormais, vous pouvez dormir et vous reposer. Voici qu’elle est proche, l’heure où le Fils de l’homme est livré aux mains des pécheurs.

Alors il revient vers les disciples et leur dit : « Désormais, vous pouvez dormir et vous reposer. Voici qu’elle est proche, l’heure où le Fils de l’homme est livré aux mains des pécheurs.
Saint Thomas d'Aquin
2726. ALORS IL VINT VERS SES DISCIPLES ET IL LEUR DIT. Premièrement, il [leur] permet de dormir ; deuxièmement, il les réveille, en cet endroit : LEVEZ-VOUS ! ALLONS ! [26, 46].

En premier lieu, il donne la permission [de dormir] ; en second lieu, il en indique la raison, en cet endroit : VOICI QUE’APPROCHE L’HEURE OÙ LE FILS DE L’HOMME SERA LIVRÉ [26, 45].

2727. Le Christ les a trouvés une première fois endormis et leur a adressé des reproches ; la seconde fois, il les a trouvés endormis et a gardé le silence ; la troisième fois, il les a trouvés endormis et leur a permis de dormir. Pour quelle raison ? La raison littérale est qu’il voulait donner au prélat une forme de correction, car, lorsqu’on vient vers quelqu’un et le trouve endormi, on ne sait si cela lui est arrivé par négligence ou par faiblesse. Et on peut le permettre. Aussi, parce que, après la résurrection, il les a trouvés endormis et le leur a reproché, Lc 24, 25 : Ô cœurs sans intelligence et lents à croire ! De même, il les a visités après qu’ils eurent reçu le Saint-Esprit, et alors il n’a rien dit, parce qu’ils étaient encore faibles, car ils observaient encore les [prescriptions] de la loi, comme le dit Pierre en Ga 2, 11. Mais il [les] visitera lors de son dernier avènement et les enverra à un repos saint et paisible. Ps 4, 9 : Je m’endormirai en lui et me reposerai.

2728. Selon Augustin, il le leur a permis alors qu’auparavant il le leur avait défendu. Mais il s’agit ici d’un autre sommeil qu’auparavant, car il s’agissait [auparavant] d’un sommeil d’accablement, et il en parle plus haut. Il dit donc, 26, 43 : LEURS YEUX ÉTAIENT APPESANTIS PAR LE SOMMEIL, et il faut blâmer cela. Mais ici, il s’agit d’un sommeil de repos, et celui-ci est permis. De même, il existe un sommeil troublé, et celui-ci est défendu. Il est dit de celui-ci en Ep 5, 14 : Debout, toi qui dors, lève-toi d’entre les morts ! En effet, il y a parfois un sommeil qui repose le corps, alors que l’âme veille : Je dors, mais mon cœur veille ! [Ct 5, 2]. Aussi, parce qu’ils allaient souffrir ; il fallait donc qu’ils soient apaisés.

2729. Ensuite, il indique la cause : VOICI QU’APPROCHE L’HEURE. Il n’avait pas à faire cela par nécessité, mais en vertu d’une disposition divine. Jn 7, 30 : Ils cherchaient à mettre la main sur lui, mais son heure n’était pas encore venue. Mais cette heure était venue. Jn 13, 1 : Jésus, sachant que l’heure était venue de passer de ce monde à son Père. Mais on pourrait dire : «Si l’heure relève d’une disposition divine, alors ceux qui le tuent ne pèchent pas.» C’est pourquoi il présente en même temps le péché : OÙ LE FILS DE L’HOMME SERA LIVRÉ AUX MAINS DES PÉCHEURS, c’est-à-dire qu’ils ne font pas cela en vertu d’une disposition divine, mais pour faire leur volonté. Jr 12, 7 : J’ai livré mon âme chérie aux mains de ses ennemis.
Louis-Claude Fillion
Puis il vint... « Lorsque Notre-Seigneur revient vers ses disciples, et qu'il les trouve endormis, la première fois, il leur en fait un reproche ; la seconde fois, il se tait ; la troisième fois, il leur ordonne de se reposer » , dit S. Hilaire notant la différence des visites que Jésus fit aux apôtres après chacune de ses prières. Tous les interprètes ne sont cependant pas de son avis sur le sens des mots dormez maintenant. Théophylacte, Euthymius, Maldonat, Meyer et d'autres croient qu'ils expriment une piquante ironie : « Voici qu'on va m'arrêter ; dormez si vous en avez le courage ! » Mais l'ironie nous paraît peu naturelle, peu digne de Jésus en un pareil moment. Rien n'indique qu'il se soit départi à cet instant de l'esprit de douceur qui avait animé tous ses actes et toutes ses paroles pendant cette soirée mémorable. Nous préférons donc, avec la plupart des commentateurs, prendre la phrase dans sa signification obvie : « Dormez maintenant et prenez du repos! », dit fort bien S. Augustin, de Cons. Evang. Livre 3, chap. 4. Désormais, il est assez fort pour se passer de tout secours humain : il permet donc aimablement à ses amis de se reposer jusqu'à l'arrivée du traître. - Reposez- vous ; cette expression marque un repos complet et favorise l'opinion que nous venons d'adopter. Le divin Maître n'a pu l'employer que pour accorder réellement aux trois disciples toute liberté de chercher dans un sommeil réparateur quelque trêve à leurs fatigues et à leurs inquiétudes. - Voici que l'heure approche... C'est comme s'il disait : Profitez de ce répit bien court qui vous est laissé. Avec quel calme l'âme de Jésus, rassérénée par la prière et par l'abandon le plus parfait au plan divin, envisage les affreuses souffrances qui l'attendent !
Fulcran Vigouroux
Dormez maintenant, etc. Ces paroles se prennent généralement dans un sens ironique. Ce n’est pas une permission que le Sauveur donne à ses apôtres, mais un reproche qu’il leur fait de ce qu’ils se mettaient si peu en peine de l’approche du péril qu’il leur avait annoncé.