Matthieu 26, 5
Mais ils se disaient : « Pas en pleine fête, afin qu’il n’y ait pas de troubles dans le peuple. »
Mais ils se disaient : « Pas en pleine fête, afin qu’il n’y ait pas de troubles dans le peuple. »
Ce n'étaient point de vrais prêtres ni de vérita bles anciens, mais les prêtres et les anciens d'un peuple qui n'avait que l'apparence du peuple de Dieu, et qui était en réalité un vrai peuple de Gomorrhe. Ils ne comprirent pas que Jésus était le souverain Pontife de Dieu, et ils lui tendirent des piéges; ils ne reconnurent pas en lui le premier-né de toute créature, celui qui précède tous les hommes par l'ancienneté de son ori gine, et ils tinrent conseil contre lui.
Pleins de leurs projets iniques, ils viennent trouver le prince des prêtres, pour demander le pouvoir d'agir à celui qui aurait dû s'opposer à leurs desseins. Il y avait alors plusieurs grands prêtres, quoique, d'après la loi, il ne devait y en avoir qu'un seul, ce qui prouve un commencement de dissolution et de décadence dans le peuple juif, car Moïse avait établi qu'il n'y aurait qu'un seul grand prêtre, et qu'on ne lui donnerait un successeur qu'après sa mort; mais, dans la suite, la dignité de grand prêtre devint annuelle. L'Évangéliste appelle donc ici princes des prêtres ceux qui avaient été revêtus de cette dignité.
Ils tinrent donc conseil pour se saisir de lui secrètement et le faire mourir, car ils craignaient le peuple, et ils voulaient attendre que la fête de Pâque fut passée. «Et ils disaient: Il ne faut point que ce soit pendant la fête». Le démon ne voulait pas que le Christ souffrît pendant la fête de Pâque, pour ne point donner un trop grand éclat à son sup plice. Quant aux princes des prêtres, peu sensibles à la crainte de Dieu et à l'énormité bien plus grande d'un crime commis pendant cette grande fête, ils n'étaient préoccupés que d'une crainte toute humaine, c'est-à-dire que l'arrestation de Jésus ne suscitât quelque tumulte parmi le peuple».
Car les sentiments du peuple étaient différents: les uns aimaient Jésus-Christ, les autres le haïssaient; les uns croyaient en lui, les autres n'y croyaient pas.
Mais l'excès même de leur méchanceté les fit changer de résolution, et ayant trouvé un traître à leur disposition, ils firent mourir Jésus-Christ pendant la fête même de Pâque.
L'expression «Alors», rattache cette circonstance à ce qui précède; «Alors», c'est-à-dire avant la célébration de la Pâque.
Or, ce qui les rend inexcusables, c'est cette double circonstance: qu'ils étaient grands prêtres, et qu'ils se réunissent pour faire le mal, car plus le nombre de ceux qui s'assemblent pour concerter un crime est grand, plus ils sont distingués par leur dignité, par leur position, par leur naissance, plus le crime qu'ils commettent devient énorme, et plus aussi le châtiment qui les attend est terrible. L'Évangéliste ajoute, pour montrer la simplicité et l'innocence du Seigneur: «Afin de se saisir de lui par ruse et de le faire mourir». Comme ils ne pouvaient trouver aucun motif légitime de le faire mourir, ils tinrent conseil pour se saisir de lui par la ruse et le mettre à mort.
Les princes des prêtres prenaient des mesures pour qu'aucun tumulte n'eût lieu dans ce saint jour de fête; mais ce qui les préoccupait, ce n'était pas la solennité du jour, c'était l'exécution de leur crime, et ils redoutaient qu'une sédition ne vint à éclater pendant la principale fête de l'année, non pas dans la crainte que le peuple ne se rendît coupable, mais de peur que Jésus ne vint à leur échapper.
Nous devons reconnaître que c'est par un dessein bien marqué de la providence de Dieu que les princes des Juifs, qui avaient si souvent cherché l'occasion de satisfaire leur fureur contre Jésus-Christ, ne reçurent le pouvoir de l'exercer contre lui qu'à la fête de Pâque. Il fallait en effet que les promesses annoncées depuis si longtemps par des mystères figuratifs eus sent un accomplissement visible et éclatant, que le véritable agneau prît la place de celui qui. l'avait figuré, et qu'un sacrifice unique tint lieu désormais des victimes multipliées de l'ancienne loi. Afin donc que les ombres s'évanouissent devant la réalité, et que les figures dis paraissent en présence de la vérité, une victime succède à une victime, le sang est remplacé par le sang, et la solennité légale reçoit son accomplissement en faisant place à une autre.
La Glose
L'Évangéliste nous raconte les préparatifs de la passion que Jésus-Christ ve nait d'annoncer et les noires intrigues qui la précédèrent: «Alors les princes des prêtres s'assemblèrent»,etc.
2614. ILS DISAIENT TOUTEFOIS : «MAIS NON PAS LE JOUR DE LA FÊTE !» Ici, il s’agit du report : la décision est présentée, puis la raison.
ILS DISAIENT TOUTEFOIS : «MAIS NON PAS LE JOUR DE LA FÊTE !» On pourrait dire qu’ils disaient cela par dévotion. [Jésus] l’écarte donc en disant : POUR ÉVITER UN TUMULTE PARMI LE PEUPLE. En effet, ils savaient que beaucoup considéraient [Jésus] comme un prophète et certains, comme le Christ. Il y avait ainsi une dissension parmi le peuple, comme on le lit en Jn 7, 30s et 9, 8s. Ils craignaient donc qu’on ne l’enlève de leurs mains. [Les conspirateurs] pensaient cela, mais le Christ pensait autre chose. Ils pensaient donc à deux choses : qu’ils voulaient le tuer, et qu’il ne devait pas être crucifié le jour de la fête, pour montrer que cette immolation succédait à l’immolation de l’agneau pascal.
ILS DISAIENT TOUTEFOIS : «MAIS NON PAS LE JOUR DE LA FÊTE !» On pourrait dire qu’ils disaient cela par dévotion. [Jésus] l’écarte donc en disant : POUR ÉVITER UN TUMULTE PARMI LE PEUPLE. En effet, ils savaient que beaucoup considéraient [Jésus] comme un prophète et certains, comme le Christ. Il y avait ainsi une dissension parmi le peuple, comme on le lit en Jn 7, 30s et 9, 8s. Ils craignaient donc qu’on ne l’enlève de leurs mains. [Les conspirateurs] pensaient cela, mais le Christ pensait autre chose. Ils pensaient donc à deux choses : qu’ils voulaient le tuer, et qu’il ne devait pas être crucifié le jour de la fête, pour montrer que cette immolation succédait à l’immolation de l’agneau pascal.
Après cette décision générale, ils prennent une détermination particulière. -
Pas pendant la fête. Dans le grec, pendant la fête, c'est-à-dire pendant toute l'octave pascale. En effet, le
danger eût été à peu près le même jusqu'à la fin, la plupart des pèlerins venus à Jérusalem pour la Pâque ne
s'en allant qu'à l'issue complète de la solennité. La Vulgate semble à tort restreindre l'expression au premier
jour de la fête. - De peur qu'il n'y ait du tumulte. Les Sanhédristes qui opinent en faveur d'un délai allèguent
ainsi leur motif déterminant. Parfois sans doute il arrivait aux autorités juives de retarder les exécutions
capitales jusqu'à l'époque des grandes fêtes, afin de produire sur les masses une salutaire impression d'effroi
par le spectacle des supplices qui attendaient les coupables ; mais, dans le cas actuel, on comprenait que
l'effet pourrait être totalement manqué, bien plus, qu'un mouvement séditieux était fort à craindre, le peuple
étant en grande partie favorable à Jésus. Ses plus chauds partisans n'étaient-ils pas des Galiléens, c'est-à-dire
des hommes remuants, facilement irritables ? A cette époque, du reste, rien n'était plus commun à Jérusalem
qu'une émeute au moment d'une fête. Les textes de Flav. Josèphe, Bell. Jud. 1, 4, 3 ; cf. 2, 12, 1 ; 4, 7, 2,
prouvent que ses compatriotes étaient coutumiers du fait. L'avis d'attendre la fin de la Pâque et le départ de la
foule était donc très prudent, car il assurait la réussite du projet antérieurement adopté. Il paraît toutefois
manifeste qu'il ne portait pas sur le fait de l'arrestation de Jésus, laquelle devait avoir lieu le plus tôt possible,
dès qu'une circonstance heureuse la faciliterait : il ne concernait probablement que l'exécution du Sauveur. -
Telle fut la résolution votée en dernier lieu. Et pourtant, chose étonnante, Notre-Seigneur fut mis à mort
publiquement, non-seulement durant l'octave pascale, mais, selon l'opinion que nous croyons la plus
probable, au jour principal de la solennité, le 15 nisan, au su et au vu de tout le peuple. Pourquoi ce brusque
revirement d'idées ? Sans nul doute, parce que le Sanhédrin apprit bientôt que ses craintes de sédition
n'étaient pas fondées, et il l'apprit quand il vit Judas, l'un des Apôtres, trahir si facilement son Maître. Jésus,
qu'ils supposaient tant aimé du peuple, avait donc des adversaires jusqu'au sein de son cercle le plus intime ?
Assurément, tout un parti nombreux parmi ses partisans pensait comme Judas, agirait comme Judas, et l'on
pouvait sans danger affronter l'opinion publique. La victoire serait ainsi plus éclatante pour les Pharisiens, la
défaite de Jésus serait plus écrasante. C'est pour cela que le Grand Conseil revint plus tard sur sa décision. -
On trouvera dans Fabricius, Codex apocr. Nov. Test. t. 3, p. 487 et ss., le protocole apocryphe de la séance du
Sanhédrin que S. Matthieu a résumée dans ces trois versets. Des pièces encore plus intéressantes, recueillies
par MM. les abbés Lémann et réunies dans leur récent opuscule : Valeur de l'assemblée qui prononça la peine
de mort contre Jésus-Christ, Lyon, 1876, permettent de reconstituer en grande partie la liste des personnages
qui composaient alors le Grand Conseil des Juifs, et d'apprécier leur valeur morale. En lisant ces documents,
on comprend que, d'une cour suprême ainsi constituée, abstraction faite de la haine qu'elle portait à Jésus,
celui-ci ne pouvait attendre ni justice, ni pitié.