Matthieu 26, 50
Jésus lui dit : « Mon ami, ce que tu es venu faire, fais-le ! » Alors ils s’approchèrent, mirent la main sur Jésus et l’arrêtèrent.
Jésus lui dit : « Mon ami, ce que tu es venu faire, fais-le ! » Alors ils s’approchèrent, mirent la main sur Jésus et l’arrêtèrent.
On pourrait dire qu'ils avaient envoyé cette grande troupe pour se saisir de lui, à cause du grand nombre de ceux qui croyaient en lui, et dans la crainte que cette multitude ne vînt à le délivrer de leurs mains. Mais pour moi, je pense que ce fut pour un autre motif, et parce qu'étant per suadés qu'il chassait les démons par Béelzébub, ils s'imaginaient qu'il pourrait, à l'aide de quelques maléfices, s'échapper des mains de ceux qui venaient s'emparer de lui. Il en est en core beaucoup qui combattent contre Jésus, armés de glaives spirituels, c'est-à-dire répandant sur Dieu des erreurs nombreuses et variées. «Or, celui qui le trahit leur avait donné ce si gne: «Celui que je baiserai», etc. il n'est pas inutile de rechercher pourquoi Judas donna un signe pour faire connaître Jésus, alors que sa figure était connue de tous les habitants de la Judée. Or, d'après une tradition qui est parvenue jusqu'à nous, Jésus se manifestait sous deux formes extérieures, l'une sous laquelle tout le monde le voyait; l'autre, sous laquelle il apparut lors de sa transfiguration sur la montagne. De plus, il se manifestait à chacun selon qu'il en était digne, et de même qu'il est écrit de la manne qu'elle avait pour chacun le goût qu'il sou haitait, ainsi le Verbe de Dieu ne se manifeste pas à tous de la même manière. Ce sont ces di verses transfigurations qui rendaient nécessaire un signe pour le faire reconnaître.
Si l'on demande pourquoi Judas a trahi Jésus par un baiser, nous répondons que selon quelques-uns ce fut pour conserver les marques extérieures de respect à l'égard de son maître, sur lequel il n'osait se jeter publiquement; selon d'autres, c'est parce qu'il craignit qu'en se déclarant ouvertement son ennemi, il ne fût cause qu'il ne lui échappât, puisque dans sa pensée le Sauveur pouvait se dérober au danger qui le menaçait et se rendre invisible. Pour moi, je pense que tous ceux qui trahissent la vérité, la trahissent par un baiser et en affectant un amour hypocrite pour elle. Tous les hérétiques disent aussi à Jésus, comme Judas: «Je vous salue, Maître». Or, Jésus lui fait une réponse pleine de douceur: «Et Jésus lui répondit: Mon ami, dans quel dessein êtes-vous venu ?» Il l'appelle «mon ami», pour lui reprocher son hypocrisie, car nous ne voyons dans l'Écriture aucun juste appelé de ce nom ( Ct 5 2Ch 20 Jdt 8 Is 41 ), tandis que le Père de famille dit au convive qui n'avait pas la robe nuptiale: «Mon ami, comment êtes-vous entré ici ?» ( Mt 22,12 ); et ailleurs, à l'un des ouvriers qui murmu raient: «Mon ami, je ne vous fais pas de tort» ( Mt 20,13 )
Ou bien, il leur donna un signe, parce que souvent il s'était échappé de leurs mains, sans qu'ils s'en aperçussent, et c'est ce qu'il eût encore fait, s'il l'eût voulu.
Jésus lui dit: «Dans quel dessein êtes-vous venu ici ?» C'est-à-dire, vous me donnez un baiser et vous me trahissez. J e sais pourquoi vous êtes venu, vous feignez d'être mon ami, alors que vous n'êtes qu'un traître.
Un des douze, c'est-à-dire qu'il était numériquement un des douze, mais qu'il ne méritait pas d'en faire partie, circonstance que l'auteur sacré relève pour faire ressortir l'énormité du crime de Judas qui, d'apôtre, était deve nu un traître: «Et avec lui une grande troupe de gens armés d'épées et de bâtons». Pour nous montrer que c'était l'envie qui avait ordonné de se saisir de Jésus, l'Évangéliste ajoute: «Qui avaient été envoyés par les princes des prêtres, et par les anciens du peuple».
Ou bien, en lui disant: «Ami, qu'êtes-vous venu faire ici»,il sous-entend: Faites ce pourquoi vous êtes venu. «Alors ils s'avancèrent, se jetèrent sur Jésus et se saisirent de lui». Alors, c'est-à-dire quand il le leur permit, car bien souvent ils en eurent le désir sans pouvoir l'exécuter.
Le Sauveur reçoit le baiser du traître, non pour nous apprendre à user de feinte et de dissimulation, mais parce qu'il ne voulait point paraître se dérober à la trahison.
Tressaille de joie, ô chrétien, tu as gagné au trafic de tes ennemis, et tu as acquis ce que Judas a vendu et ce que le Juif a acheté.
La Glose
L'Évangéliste vient de nous dire que le Seigneur avait été lui-même au-devant de ses persécuteurs; il nous raconte maintenant comment ils se saisirent de sa personne: «il par lait encore, lorsque Judas, un des douze», etc.
2738. MAIS JÉSUS LUI DIT : «AMI, POURQUOI ES-TU VENU ?» Cela peut être lu comme une interrogation ou comme de l’indulgence. Si [on le lit] comme une interrogation, on peut alors lire que cela a été dit comme un reproche, comme s’il disait : «Tu manifestes de l’amitié par un baiser et tu es venu me perdre ?», conformément à Ps 27[28], 3 : Ils ont la paix à la bouche, mais le mal est dans leur cœur. Et [Le Seigneur] dit : «AMI !» Chaque fois qu’il en appelle un autre : «Ami !», il exprime un reproche. Ainsi a-t-il été dit plus haut, 22, 12 : Ami, comment es-tu entré ici sans porter le vêtement de noces ? Et ailleurs, 20, 13 : Ami, je ne te fais pas de tort, etc. 1 Jn 4, 19 : Ce n’est pas nous qui l’avons aimé en premier lieu, mais lui qui nous a d’abord aimés. Ou bien, on peut lire cela comme [une expression] d’indulgence. Il ne s’agit pas alors d’une parole de reproche, mais d’indulgence : AMI, POURQUOI ES-TU VENU ? Selon Jn 13, 27 : Ce que tu as à faire, fais-le vite ! Et il l’appelle «ami» pour ce qui le concerne, car avec ceux qui haïssaient la paix, j’ai été pacifique, Ps 119[120], 7. Et bien qu’il sût qu’il devait l’embrasser, il s’avança cependant vers lui.
2739. ALORS, S’AVANÇANT, ILS MIRENT LA MAIN SUR JÉSUS. Maintenant, il s’agit de la capture : premièrement, la rudesse de la capture est présentée ; deuxièmement, le témoignage ; troisièmement, le reproche adressé à un disciple.
À propos du premier point, [Matthieu] fait trois choses : premièrement, il dit comment les serviteurs s’emparèrent de lui ; deuxièmement, comment un disciple voulut l’empêcher ; troisièmement, comment le Christ le lui reprocha.
[Matthieu] dit donc : ALORS, S’AVANÇANT, ILS MIRENT LA MAIN SUR JÉSUS. Is 1, 15 : Vos mains sont pleines de sang. [Le Seigneur] se livra lui-même. Jr 12, 7 : J’ai livré mon âme chérie aux mains de ses ennemis.
2739. ALORS, S’AVANÇANT, ILS MIRENT LA MAIN SUR JÉSUS. Maintenant, il s’agit de la capture : premièrement, la rudesse de la capture est présentée ; deuxièmement, le témoignage ; troisièmement, le reproche adressé à un disciple.
À propos du premier point, [Matthieu] fait trois choses : premièrement, il dit comment les serviteurs s’emparèrent de lui ; deuxièmement, comment un disciple voulut l’empêcher ; troisièmement, comment le Christ le lui reprocha.
[Matthieu] dit donc : ALORS, S’AVANÇANT, ILS MIRENT LA MAIN SUR JÉSUS. Is 1, 15 : Vos mains sont pleines de sang. [Le Seigneur] se livra lui-même. Jr 12, 7 : J’ai livré mon âme chérie aux mains de ses ennemis.
Du moins il voulut montrer au traître qu'il n'était pas induit en
erreur par cette marque extérieure d'amitié. - Mon ami. Quelques auteurs attribuent encore à cette expression
une signification ironique. Ce serait, suivant eux, un synonyme de « homme très mauvais ». Nous préférons
la regarder comme une parole de bonté adressée au traître pour le toucher. Au reste, il est à remarquer que
Notre-Seigneur, d'après le texte grec, ne donna pas à Judas le doux nom d'ami, mais fit usage du titre que les
Docteurs employaient à l'égard de leurs disciples en des moments de condescendance et de familiarité. Cf.
Schleussner, Lexic. ad N.T. s.v.h. ; Bretschneider, Lexic. Man., ibid. - Pourquoi es-tu venu. Exclamation de
douloureuse surprise, et en même temps reproche justement sévère sous une forme pleine de délicatesse. Il y
a dans ces mots un appel foudroyant à la conscience et au cœur de Judas. Le Sauveur ajouta, d'après le récit
de S. Luc : « Judas, c'est par un baiser que tu livres le Fils de l'homme! ». - Alors ils s'avancèrent : non pas
seulement d'une manière immédiate ; auparavant eut lieu la scène racontée par S. Jean, 18, 4-8. - Mirent les
mains... S. Jean Chrysostôme ne peut s'empêcher de dire en citant ce trait : « Cependant ils n'auraient rien pu
faire, si lui-même ne l'avait permis ! » Hom. 83 in Matth. « Que n'étais-je là avec mes Francs ! » s'écriait un
héros bien connu en entendant le récit de la Passion.