Matthieu 26, 69

Cependant Pierre était assis dehors dans la cour. Une jeune servante s’approcha de lui et lui dit : « Toi aussi, tu étais avec Jésus, le Galiléen ! »

Cependant Pierre était assis dehors dans la cour. Une jeune servante s’approcha de lui et lui dit : « Toi aussi, tu étais avec Jésus, le Galiléen ! »
Saint Thomas d'Aquin
2777. CEPENDANT PIERRE ÉTAIT ASSIS DEHORS. Ici, il s’agit du reniement de Pierre. Lc 19, 53 suit un autre ordre, car il présente le reniement de Pierre avant la dérision à l’endroit du Christ ; mais Matthieu fait le contraire. Il ne s’agit pas là d’une contradiction, car, alors qu’on riait du Christ, [le reniement] avait lieu simultanément. Cela n’a donc pas d’importance qu’on le présente avant ou après.

Il faut noter que, pendant que [le Christ] était amené, [Pierre] ne [le] renie pas ; mais [il le fait] lorsqu’on rit [du Christ]. [Pierre] renie afin de signifier que certains craignent davantage l’humiliation que les coups, à l’encontre de Is 51, 7 : Ne craignez pas les insultes des hommes et ne redoutez pas leurs blasphèmes !

2778. À ce propos, le reniement est d’abord présenté ; en second lieu, le repentir de Pierre : ET AUSSITÔT UN COQ CHANTA. ET PIERRE SE SOUVINT DE LA PAROLE QUE JÉSUS AVAIT DITE [26, 74 75].

La première partie est divisée en trois, selon les trois reniements. La seconde [se trouve] en cet endroit : COMME IL SORTAIT DE LA PORTE, etc. [26, 71] ; la troisième, en cet endroit : PEU APRÈS, CEUX QUI SE TENAIENT LÀ, etc. [26, 73].

Premièrement, le lieu est présenté ; deuxièmement, l’occasion ; troisièmement, le reniement.

2779. [Matthieu] dit donc : CEPENDANT PIERRE ÉTAIT ASSIS DEHORS, à savoir, en dehors de l’endroit où le Christ souffrait. En effet, ceux qui s’éloignent du Christ sont aussitôt confondus. Jr 17, 13 : Seigneur, tous ceux qui t’abandonnent seront confondus. En sens contraire, Ps 33[34], 6 : Approchez-vous de lui et vous serez illuminés, et vos visages ne seront pas confondus. Car celui qui est à l’extérieur de la passion du Christ tombe facilement.

2780. Ensuite une incitation au reniement est présentée : UNE SERVANTE S’APPROCHA DE LUI EN DISANT : «TOI AUSSI, TU ÉTAIS AVEC JÉSUS LE GALILÉEN !» Et la chute de Pierre se rapproche de celle du premier homme. Si 25, 33 : Le péché a commencé par une femme. De même, Pierre a-t-il renié le Christ en entendant une femme. Par cela, le Seigneur a voulu rabaisser sa présomption, car [il n’a pas renié] en entendant un homme, mais une femme. TOI AUSSI, TU ÉTAIS AVEC JÉSUS LE GALILÉEN ! Cela était d’habitude un titre de gloire pour lui, mais maintenant cela est un sujet de crainte.
Louis-Claude Fillion
Cette scène a toujours été l'objet de vives discussions, parce qu'il est peu d'endroits du récit évangélique où il règne une aussi grande divergence parmi les historiens de Jésus. En rapprochant les unes des autres les quatre rédactions, le lecteur verra que, si les évangélistes notent expressément trois actes distincts et consécutifs de négation, conformément à la prophétie du Sauveur, cf. Matth. 26, 34 et parall., ils diffèrent d'une manière notable sur les questions de lieux, de personnes, etc. Les rationalistes crient naturellement à la contradiction, suivant leur coutume ; puis, en vertu de cette assertion qu'ils supposent infaillible, ils rejettent le récit des synoptiques pour s'en tenir à celui de S. Jean, qui serait plus vraisemblable parce qu'il est plus simple, disent -ils. Les commentateurs croyants voient au contraire dans ces légers écarts de détails un nouvel exemple de l'indépendance des quatre évangélistes, et, par suite, une preuve frappante de leur véracité. Sur ce point comme sur tous les autres, l'harmonie s'établit sans difficulté, sans coup de force : tous les hommes de bonne foi l'admettent. Le principe posé par Bengel, Gnomon, in h.l., et généralement suivi depuis par les commentateurs, facilite beaucoup la solution de ce petit problème évangélique. « Le triple reniement de S. Pierre consiste, non pas dans trois actes isolés, mais dans trois circonstances distinctes, où l'Apôtre renia plusieurs fois son Maître », Fouard, Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, p. 186 ; Cf. p. 60 et ss. Le « tu me renieras trois fois » ne doit donc pas se restreindre à trois paroles sorties de la bouche de S. Pierre ; car, si l'on additionnait les différentes occasions dans lesquelles le chef des Apôtres renia Jésus d'après les quatre évangélistes, on obtiendrait jusqu'à six (Denys le chartreux), sept (Cajetan) et même huit négations (Paulus). La prédiction admet un sens plus large. En combinant ensemble toutes ces négations, on obtient trois groupes de questions et de réponses ou, si l'on veut, trois actes successifs qui se composent chacun de plusieurs scènes variées, c'est-à-dire trois actes durant lesquels S. Pierre, interrogé à diverses reprises par des personnes nouvelles, renia plusieurs fois Notre-Seigneur Jésus-Christ. (voir ces groupes à la note de Joan. 18, 27). Cela suffit pour réaliser l'expression « trois ». Quant aux écrivains sacrés, ils ont librement choisi parmi tous les détails du fait ceux qui leurs convenaient ou qu'ils connaissaient le mieux : des traits qu'ils omettent ou de ceux qu'ils racontent chacun en particulier, on ne peut rien conclure contre la narration des autres. Les dissemblances qui règnent entre eux ne sont donc que des variantes sans gravité. - Pierre était assis... Après avoir exposé sans l'interrompre l'interrogatoire de Jésus et ses suites immédiates, S. Matthieu revient sur un triste incident qui s'était passé dans la cour du palais, tandis que, non loin de là, Notre-Seigneur était jugé par le Sanhédrin. Il le raconte tout d'un trait, bien qu'il se fût composé de parties distinctes, séparées par des intervalles assez considérables. Il rappelle d'abord que S. Pierre, durant les débats, était demeuré assis dehors dans la cour, avec les serviteurs. Plus haut, v. 58, il est vrai, il avait été dit que Simon-Pierre s'était glissé à l'intérieur : mais le narrateur pensait alors à la rue, que l'Apôtre venait de quitter pour passer dans l'intérieur de la cour. Il écrit maintenant « dehors », par opposition avec les appartements, et surtout à la salle dans laquelle Jésus était jugé. Voir dans Abbott, the N. Test. t. 1, p.303, le plan d'une maison orientale avec sa cour intérieure. - Tandis que Pierre, inquiet du cours que prenaient les événements, se chauffe en silence, pensant à son Maître, une servante, la portière d'après S. Jean, 18, 17, s'approche de lui, le regarde avec attention, et lui dit tout à coup : Toi aussi, tu étais avec Jésus de Galilée, c'est-à-dire, tu le suivais habituellement, tu es l'un de ses disciples. La portière faisait cette conjecture en voyant l'air triste, effrayé de l'Apôtre. Telle n'était pas l'attitude des gardes qui avaient arrêté Jésus ! La servante pouvait aussi avoir aperçu S. Pierre dans la société du Sauveur.