Matthieu 27, 50
Mais Jésus, poussant de nouveau un grand cri, rendit l’esprit.
Mais Jésus, poussant de nouveau un grand cri, rendit l’esprit.
Il en est qui argumentent de ce texte pour attaquer la vérité de l'Évangile; car depuis le commencem ent du monde, les éclipses de soleil ont toujours eu lieu dans les temps prévus et marqués. Or, ces phénomènes qui arrivent périodiquement à des époques prévues d'avance, n'ont jamais lieu que lorsque le soleil se rencontre avec la lune, et que la lune, s'interposant entre le soleil et la terre, empêche ses rayons de parvenir jusqu'à nous. Or, à l'époque de l'année où la passion de Jésus-Christ eut lieu, il est évident qu'il ne pouvait y avoir de conjonction du soleil et de la lune, puisqu'on était au temps de Pâque, qui se célèbre à l'époque de la pleine lune. Des chré tiens, pour résoudre cette difficulté, ont avancé que cet obscurcissement du soleil avait été un miracle, comme tant d'autres faits qui se produisirent alors en dehors des lois ordinaires de la nature.
Mais les enfants du siècle nous font cette objection: Comment se fait-il qu'aucun écri vain grec ou étranger n'ait rapporté un fait aussi étonnant, alors qu'ils nous ont transmis a vec soin le souvenir de tous les événements extraordinaires dont ils ont été témoins? Il est vrai que Phlégon, dans ses chroniques, rapporte qu'une éclipse eut lieu sous l'empire de Tibère César, mais il ne dit pas que ce fut à l'époque de la pleine lune. C'est ce qui me porte à croire que ce prodige, aussi bien que tous les autres qui eurent lieu pendant la passion du Sauveur, tels que le tremblement de terre et le voile du temple déchiré, furent restreints à la ville de Jéru salem. Ou si l'on veut l'étendre à toute la Judée, il faudra donner à ces paroles le sens qu'elles ont dans ce passage du livre des Rois, où Abdias dit à Elie: «Vive le Seigneur votre Dieu, il n'y à point de nation ni de royaume où mon Seigneur n'ait envoyé vous chercher» (), c'est-à-dire qu'il l'avait cherché dans les contrées voisines de la Judée. Nous devons donc admettre que d'épaisses et profondes ténèbres s'étendirent sur toute la ville de Jérusalem et sur toute la terre de Judée. La terre fut couverte d'épaisses ténèbres depuis la sixième heure jusqu'à la neuvième heure. Car nous lisons que deux espèces différentes d'êtres ont été créés le sixième jour, les animaux avant la sixième heure, et l'homme à cette heure là même. Il convenait donc que celui qui mourait pour le salut du genre humain fût attaché sur la croix à la sixième heure, et que par suite, les ténèbres se répandissent sur toute la terre de la sixième heure à la neuvième. Lorsque Moïse leva ses mains vers le ciel ( Ex 10,22 ), les ténèbres se répandirent sur les Egyptiens qui tenaient le peuple de Dieu en servitude; de même à la sixième heure, alors que le Christ étendait ses mains sur la croix et les levait vers le ciel, les ténèbres enveloppèrent ce peuple qui avait crié: «Crucifiez-le», et il se trouva privé de toute lumière, en signe des ténèbres qui devaient envelopper toute la nation juive. Sous Moïse encore, les ténèbres couvri rent pendant trois jours toute la terre d'Egypte, tandis que tous les enfants d'Israël étaient dans la plus vive lumière; c'est ainsi que pendant la passion de Jésus-Christ, les ténèbres se répandi rent pendant trois heures sur toute la Judée, parce qu'elle était privée, en punition de ses pé chés, de la lumière de Dieu le Père, de la splendeur du Christ, et de la clarté de l'Esprit saint, tandis que la lumière éclairait tout le reste de la terre, figure de cette lumière qui éclaire dans tous les lieux l'Église de Dieu en Jésus-Christ. Et si les ténèbres couvrirent toute la Judée, jus qu'à la neuvième heure, il s'ensuit que la lumière a dû de nouveau briller à leurs yeux: «Car lorsque la plénitude des nations sera entrée, alors tout Israël sera sauvé». ( Rm 11,25 )
Examinons pourquoi Jésus-Christ a été abandonné de Dieu. Quelques-uns, dans l'impossibilité d'expliquer comment le Christ peut être délaissé de Dieu, disent que c'est par humilité qu'il s'est ainsi exprimé; mais vous pourrez comprendre facilement le sens de ces paroles, en comparant la gloire dont le Fils de Dieu jouit dans le sein de son Père avec la honte et l'ignominie qu'il méprise en souffrant la mort de la croix.
Lorsqu'il vit les ténèbres couvrir toute la terre de Judée, Jésus prononça ces paroles dont voici le sens: Vous m'avez abandonné, mon Père, c'est-à-dire vous m'avez livré comme anéanti sous le poids de telles calamités, afin que ce peuple que vous avez comblé d'honneur, reçoive le châtiment de tout ce qu'il a osé entreprendre contre moi, et qu'il soit privé de la lumière de vos regards. Vous m'avez aussi abandonné pour le salut des nations. Mais quel si grand bien ont pu faire les hommes qui ont embrassé la foi parmi les Gentils, pour mériter d'être racheté de l'enfer par tout mon sang répandu sur la croix? Ou comment les hommes pourront-ils reconnaître dignement les supplices que je souffre pour eux? Peut-être que jetant les regards sur les péchés des hommes qu'il expiait sur la croix, il dit à Dieu: «Pourquoi m'avez-vous abandonné ?» Pour que je devinsse comme celui qui ramasse les épis qui restent après la moisson et les grains échappés à la main du vendangeur. ( Mi 7,1 ) Ne pensez pas cependant que ce soit sous l'impression d'un sentiment purement humain et comme vaincu par la douleur, qu'il endure sur la croix que le Sauveur s'exprime de la sorte; si vous l'entendiez ainsi, vous ne comprendriez pas ce grand cri qu'il jette, et qui nous annonce un grand mystère caché.
Peut-être aussi peut-on dire que tous ceux qui ont la science de la doctrine ecclésiastique, mais dont la vie est mauvaise, donnent à boire à Jésus-Christ du vin mélangé de fiel. Ceux, au contraire, qui appliquent à Jésus-Christ des maximes qui sont opposées la vérité, comme s'il en était l'auteur, ceux-là placent au bout du roseau de l'Écriture une éponge remplie de vinaigre, et la présentent aux lèvres du Sauveur.
Le vinaigre est un vin qui s'est aigri ou par sa mauvaise qualité, ou par le mauvais état du vase qui le contient, ou par négligence. Le vin représente l'honneur de l'immortalité et de la vertu. Or, lorsque le vin se fut aigri en Adam, le Sauveur en prit et en fut abreuvé par les nations. Ce vin est présenté au moyen d'une éponge placée au bout d'un bâton; c'est-à-dire que le Sauveur reçut du corps des nations les faiblesses qui avaient corrompu en nous le principe de l'immortalité, et qu'il les fit pour ainsi dire passer en lui-même, pour communiquer l'immortalité à tout ce qui avait été altéré et cor rompu.
Ou bien, il expire en jetant un grand cri par la douleur qu'il éprouve de ne pouvoir effacer les pé chés de tous les hommes ( Is 53,6 1P 2,24 ).
De ces paroles, les hérétiques veulent conclure ou que le Verbe de Dieu s'est comme anéanti en prenant la place de l'âme unie au corps, et en lui donnant la vie qu'il reçoit de l'âme, ou bien que Jésus-Christ n'était pas un homme véritable, parce que le Verbe de Dieu n'habitait en lui que comme il était autrefois dans l'esprit des prophètes. Il sem ble, d'après ces hérétiques, que Jésus-Christ ne soit qu'un homme ordinaire, composé d'un corps et d'une âme comme nous, et qu'il ne date son existence que du jour où il a été fait homme, lui qui, dépouillé de la protection de Dieu qui se retire de lui, s'écrie: «Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m'avez-vous abandonné». Ou bien encore, ajoutent-ils, la nature hu maine s'étant comme confondue avec l'âme du Verbe, Jésus-Christ a été secouru en tout par la puissance de son Père, et maintenant qu'il est privé de ce secours, et abandonné à la mort, il se plaint de cet abandon, et en appelle à celui qui l'a délaissé. Mais au milieu de ces opinions aussi faibles qu'impies, la foi de l'Église, toute pénétrée de la doctrine des Apôtres, ne divise po int Jésus-Christ, et ne laisse point à penser qu'il ne soit pas à la fois Fils de Dieu et Fils de l'homme. En effet, la plainte qu'il fait entendre dans son délaissement, c'est la faiblesse de l'homme qui va mourir, et la promesse qu'il fait du paradis au bon larron, c'est le royaume du Dieu vivant. En se plaignant d'être abandonné au moment de sa mort, il vous prouve qu'il est homme, mais tout en mourant, il assure qu'il règne dans le paradis, et vous montre ainsi qu'il est Dieu. Ne soyez donc pas surpris de l'humilité de ses paroles et des plaintes qu'il fait enten dre dans son délaissement, lorsque sachant bien qu'il a revêtu la forme d'esclave, vous êtes témoin du scandale de la croix.
La créature ne pouvait supporter la vue des outrages faits au Créateur; aussi le soleil retira-t-il ses rayons pour ne pas être témoin des forfaits de ces im pies: «Depuis la sixième heure, les ténèbres couvrirent toute la terre».
Les ténèbres durèrent trois heures, tandis qu'une éclipse de soleil ne dure qu'un instant, et n'a point de temps d'arrêt, comme le savent les astronomes.
Il jette un grand cri pour montrer qu'il agit ici en vertu de sa puissance, et en criant ainsi d'une voix forte au moment où il expire, il prouve de la manière la plus évidente, qu'il est le Dieu véritable, puisque les hommes, prêts de rendre le dernier soupir, peuvent à peine faire entendre un souffle de voix.
Ou bien suivant une autre explication, ce qu'il y avait d'admirable, c'est que ces ténèbres étaient répandues sur toute la face de la terre, ce qui n'était jamais arrivé au paravant. Car les ténèbres ne couvrirent que l'Egypte seule, au moment de la célébration de la Pâque, ténèbres qui étaient la figure de celles qui eurent lieu à la mort de Jésus-Christ. Et re marquez que ces ténèbres se répandent au milieu du jour, au moment où la lumière inonde toute la terre de sa clarté, afin que tous les habitants de la terre en fussent témoins. C'est là ce signe que Jésus promettait de donner aux Juifs qui lui en faisaient la demande, lorsqu'il disait: «Cette génération adultère et perverse demande un signe, et il ne lui en sera pas donné d'autre que celui du prophète Jonas»,figure de sa croix et de sa résurrection; car il était bien plus étonnant qu'il opérât ce prodige, étant attaché sur la croix, que pendant le cours de sa vie. Ce miracle suffisait certainement pour les convertir, non seulement par la grandeur du fait consi déré en lui-même, mais encore parce que le Sauveur l'opéra après qu'ils eurent épuisé contre lui toutes les insultes, tous les outrages que la haine put leur suggérer. Mais comment purent-ils se défendre d'un sentiment d'admiration, et reconnaître qu'il était Dieu? C'est que le genre humain tout entier était livré à une malice prodigieuse, et plongé dans une torpeur inexprima ble; que ce miracle fut de courte durée et qu'ils en ignoraient la cause. Aussi Jésus fait enten dre ensuite sa voix, pour leur montrer qu'il est encore vivant et qu'il est l'auteur de ce miracle: «Et sur la neuvième heure, Jésus jeta un grand cri en disant: Eli ! Eli ! lamma sabacthani ?»c'est-à-dire «Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m'avez-vous abandonné ?»
Or, Jésus cite ces paroles du p rophète, pour rendre hommage jus qu'au dernier moment, à l'Ancien Testament, et pour faire voir qu'il honore son Père, et ne lui est pas opposé, et il prononce ces paroles en hébreu, pour être compris des Juifs qui l'entendent.
Ce n'est pas tous, mais quelques-uns, sans doute les soldats romains qui ne compre naient pas l'hébreu, et qui pensaient qu'il appelait Elie, parce qu'il s'était écrié: Eh ! Eh ! Si l'on attribue cette réflexion aux Juifs, il faudra dire que suivant leur habitude, i ls accusent le Seigneur de faiblesse, parce qu'il demande le secours d'Elie.
Notre-Seigneur a cité le commencement du psaume vingt et unième. Ces paroles qui se trouvent au milieu du verset: «Jetez les yeux sur moi», ont été surajoutées, car le texte hébreu porte seu lement: «Mon Dieu ! mon Dieu ! pourquoi m'avez-vous abandonné ?» Il n'y a donc que des impies qui puissent prétendre que ce psaume a pour objet la personne d'Esther et de Mardo chée, puisque les Évangélistes lui ont emprunté d'autres témoignages qu'ils appliquent au Sau veur, celui-ci en particulier: «Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont percé mes mains».
C'est pour Jésus-Christ un acte de puissance toute divine que de rendre l'esprit, comme lui-même l'avait prédit: «Personne ne peut m'ôter la vie; mais c'est de moi-même que je la quitte, et j'ai le pouvoir de la reprendre». L'esprit, dans ce passage, doit être pris pour l'âme, soit parce qu'il donne la vie au corps et le rend pour ainsi dire spirituel, soit parce que l'esprit est l'essence de l'âme, selon ces paroles: «Vous leur ôterez l'esprit, et ils tomberont dans la défaillance» ( Ps 104,29 ).
Ainsi celui qui alimente les fontaines est abreuvé de vinaigre; celui qui nous donne le miel est nourri de fiel; la miséricorde est flagellée; celui qui accorde le pardon est condamné; la majesté est insultée; la vertu tournée en dérision, et celui qui répand les pluies fécondantes est couvert de crachats.
Saint Luc nous apprend quel fut l'objet de ce grand cri: «Et Jésus s'écria d'une voix forte: Mon Père, je remets mon âme entre vos mains».
Après que Jésus-Christ eut épuisé toutes les peines, la mort s'arrête, car elle sent qu'il n'y a rien en lui qui lui appartienne. La nouveauté est suspecte à la vétusté; c'est le premier, c'est le seul homme qu'elle voit sans péché, pur de tout crime, et n'étant soumis en aucune manière à ses lois. Mais la mort ne laisse pas de s'associer à la fureur des Juifs, et elle se jette en désespé rée sur l'auteur de la vie: «Or, Jésus, jetant encore un grand cri, rendit l'esprit».Qu'y a-t-il donc qui puisse nous déplaire, en ce que Jésus-Christ ait quitté le sein de son Père, pour venir nous délivrer de notre servitude et nous faire partager sa liberté; qu'il se soit soumis à notre mort pour nous en affranchir par sa propre mort, alors qu'en nous inspirant le mépris de la mort, il nous a placés, simples mortels, au rang des dieux, et malgré notre origine terrestre, nous a égalés aux esprits célestes? Car autant sa puissance divine brille dans le spectacle de ses oeuvres, autant il nous donne une preuve éclatante de son immense charité, en consentant à souffrir pour ses sujets, et à mourir pour ses serviteurs. Telle fut la première raison de la pas sion du Seigneur, il voulut faire connaître combien Dieu aimait l'homme, lui qui veut être bien plus aimé que craint des hommes. La seconde cause, ce fut de détruire avec plus de justice la juste sentence de mort qu'il avait portée contre l'homme. Le premier homme avait au jugement de Dieu, encouru la mort par son péché, et l'avait transmise à ses descendants; le second ( 1Co 15,47 ) vint du ciel, pur de tout péché, pour condamner la mort qui, n'ayant reçu de droits que sur les coupables, avait osé s'attaquer à la source même de toute sainteté. Il n'est point surprenant qu'il ait quitté pour nous ce qu'il a reçu de nous, c'est-à-dire son âme, lui qui a fait tant pour nous, et qui nous a comblés de tant de bienfaits.
Que les fidèles se gardent bien de penser que Jésus-Christ ait pu ressentir la mort, de ma nière qu'en ce qui le concerne, la vie ait perdu la vie; car s'il en était ainsi, comment, pendant ces trois jours, pourrions-nous dire que tout ce qui respire ait conservé la vie, si la source même de la vie avait été desséchée? La divinité du Christ n'a donc ressenti la mort que par son union à notre humanité, ou par la communion aux faiblesses de notre nature qu'il avait prises volontairement; mais il n'a point perdu la puissance de sa nature, qui donne la vie à tout ce qui existe. Lorsque nous mourons nous-mêmes, notre corps, privé de la vie, n'en dépouille pas notre âme; l'âme, en se retirant, ne perd point sa vertu, elle ne fait qu'abandonner le corps qu'elle vivifiait, et c'est elle-même qui est la cause de la mort du corps, loin d'en être la vic time. Quant à l'âme du Sauveur, nous dirons que ce n'est ni à cause de la divinité dont elle était le temple, ni par suite de sa pureté extraordinaire, mais d'après les lois ordinaires de la mort, qu'elle a pu abandonner son corps pendant ces trois jours, sans être elle-même exposée aux coups de la mort. Car je crois que le Fils de Dieu est mort, non pour subir la peine due au péché, peine qu'il ne put encourir en aucune façon, mais par une suite de la sentence portée contre tous les hommes, et à laquelle il s'est soumis pour la rédemption du genre humain.
Nous vîmes tout d'un coup et sans y être préparés, la lune s'interposer entre le soleil et la terre (car ce n'était pas le temps de la rencontre naturelle de ces deux astres), nous la vîmes de nouveau depuis la neuvième heure jusqu'au soir, couvrir contrairement aux lois de la nature le diamètre du soleil. Nous vîmes cette éclipse commencer à l'Orient, s'avancer vers le couchant, et puis revenir pour ainsi dire sur ses pas. Nous fûmes encore témoins de ce fait extraordinaire, que ce ne fut pas du même côté du soleil que la lune s'avança sur cet astre, et se retira ensuite, mais dans un sens diamétralement opposé.
Ou bien, les Juifs eux-mêmes étaient ce vinaigre, eux qui étaient comme un vin dégénéré des patriarches et des prophètes, et qui avaient des coeurs creusés par la fraude, comme l'est une éponge par les cavités profond es et tortueuses qu'elle renferme. Le roseau figure la sainte Écriture qui. recevait ainsi son accomplissement; car de même qu'on appelle langue grecque ou hébraïque le langage que ces langues servent à former, ainsi on peut donner le nom de roseau aux lettres où à l'écriture qui sont tracées au moyen d'un roseau.
Quoique Jésus-Christ soit mort comme homme, et que son âme sainte ait été séparée de son corps exempt de toute souillure, cependant la divinité est restée inséparablement unie à l'une et à l'autre, c'est-à-dire à l'âme et au corps, et l'unité de personne n'a souffert aucune division. Le corps et l'âme ont eu, dès le commencement, leur existence dans la personne du Verbe, et l'ont conservée jusque dans la mort; car ni le corps ni l'âme n'ont eu d'autre personnalité que celle du Verbe.
Ou bien le Sauveur jette ce cri, parce qu'il s'était comme revêtu de nos senti ments, et que lorsque nous sommes dans le danger, nous nous croyons abandonnés de Dieu. En effet, Dieu avait abandonné la nature humaine par suite du péché, mais comme le Fils de Dieu est devenu notre avocat, il pleure la misère de ceux dont il a pris sur lui les fautes, et il nous apprend par là combien les pécheurs doivent verser de larmes, en voyant ainsi pleurer celui qui n'a jamais commis le péché.
Les soldats ne comprenaient pas le sens des paroles du Sauveur, aussi ils attendaient, mais bien inutilement, l'arrivée d'Elie. Quant à Notre-Seigneur, il était uni d'une manière indis soluble avec le Dieu qu'il invoquait en langue hébraïque.
La Glose
On dit que Dieu a délaissé son Fils au moment de sa mort, parce qu'il l'a exposé au pouvoir de ses persécuteurs, il lui a retiré sa protection, mais n'a point brisé les liens qui l'unissaient à lui.
2875. OR JÉSUS, POUSSANT DE NOUVEAU UN GRAND CRI, RENDIT L’ESPRIT. Il s’agit ici de ce qui est arrivé après la mort [du Christ]. Premièrement, la mort du Christ est présentée ; deuxièmement, ce qui est arrivé ; troisièmement, l’effet. Le second point [se trouve] en cet endroit : VOILÀ QUE LE VOILE DU TEMPLE SE DÉCHIRA [27, 51] ; le troisième, en cet endroit : MAIS LE CENTURION, etc. [27, 54].
À propos du premier point, la mort est abordée et le mode de la mort
2876. La cause de la mort est triple. Une cause avait pour but de montrer à quel point il nous aimait. Augustin [écrit] : «Il n’y a pas de plus grande raison d’aimer que d’être précédé dans l’amour.» Rm 5, 8 : La preuve de la charité de Dieu pour nous, c’est que, alors que nous étions pécheurs, le Christ est mort pour nous. De même, c’était pour nous enseigner à mépriser la mort. Par la mort, il a détruit tous les péchés. C’était aussi pour enlever la peine du péché d’Adam, c’est-à-dire pour nous libérer du péché d’Adam. En effet, il avait été dit [à Adam], Gn 2, 17 : Dès que vous en aurez mangé, vous mourrez. [Le Christ] nous a libérés de cette mort. C’était aussi parce que le Diable, qui est fauteur de mort, s’était jeté sur lui, qui ne le méritait pas. [Le Christ] lui enleva ainsi [son] pouvoir sur les autres. Il livra donc son âme à la mort pour nous libérer.
2877. La condition de la mort est aussi indiquée : POUSSANT UN GRAND CRI, IL RENDIT L’ESPRIT. Certains ont dit que la divinité était morte, mais cela est faux, car la vie ne peut pas mourir. Or, Dieu est non seulement vivant, mais il est la vie. Certains ont dit que l’âme [du Christ] est morte avec le corps, ce qui est impossible, car elle ne pourrait alors posséder l’immortalité. Il faut aussi remarquer que tous meurent par nécessité, mais que le Christ [est mort] de sa propre volonté. [Matthieu] ne dit donc pas qu’il est mort, mais qu’IL RENDIT [SON ESPRIT], car [il le fit] de sa propre volonté. Et cela indique [sa] puissance, comme on le dit ailleurs, Jn 10, 18 : J’ai le pouvoir de déposer mon âme, et j’ai aussi le pouvoir de la reprendre. Et il voulut mourir dans un grand cri pour indiquer qu’il mourait volontairement, et non par nécessité. Il a donc déposé son âme lorsqu’il l’a voulu et l’a reprise lorsqu’il l’a voulu. Il a donc été plus facile pour le Christ de déposer son âme et de la reprendre que pour un autre de s’endormir et de se réveiller. Mais pourquoi [cette mort] leur a-t-elle été imputée ? Parce qu’ils ont fait ce qui était en leur pouvoir.
À propos du premier point, la mort est abordée et le mode de la mort
2876. La cause de la mort est triple. Une cause avait pour but de montrer à quel point il nous aimait. Augustin [écrit] : «Il n’y a pas de plus grande raison d’aimer que d’être précédé dans l’amour.» Rm 5, 8 : La preuve de la charité de Dieu pour nous, c’est que, alors que nous étions pécheurs, le Christ est mort pour nous. De même, c’était pour nous enseigner à mépriser la mort. Par la mort, il a détruit tous les péchés. C’était aussi pour enlever la peine du péché d’Adam, c’est-à-dire pour nous libérer du péché d’Adam. En effet, il avait été dit [à Adam], Gn 2, 17 : Dès que vous en aurez mangé, vous mourrez. [Le Christ] nous a libérés de cette mort. C’était aussi parce que le Diable, qui est fauteur de mort, s’était jeté sur lui, qui ne le méritait pas. [Le Christ] lui enleva ainsi [son] pouvoir sur les autres. Il livra donc son âme à la mort pour nous libérer.
2877. La condition de la mort est aussi indiquée : POUSSANT UN GRAND CRI, IL RENDIT L’ESPRIT. Certains ont dit que la divinité était morte, mais cela est faux, car la vie ne peut pas mourir. Or, Dieu est non seulement vivant, mais il est la vie. Certains ont dit que l’âme [du Christ] est morte avec le corps, ce qui est impossible, car elle ne pourrait alors posséder l’immortalité. Il faut aussi remarquer que tous meurent par nécessité, mais que le Christ [est mort] de sa propre volonté. [Matthieu] ne dit donc pas qu’il est mort, mais qu’IL RENDIT [SON ESPRIT], car [il le fit] de sa propre volonté. Et cela indique [sa] puissance, comme on le dit ailleurs, Jn 10, 18 : J’ai le pouvoir de déposer mon âme, et j’ai aussi le pouvoir de la reprendre. Et il voulut mourir dans un grand cri pour indiquer qu’il mourait volontairement, et non par nécessité. Il a donc déposé son âme lorsqu’il l’a voulu et l’a reprise lorsqu’il l’a voulu. Il a donc été plus facile pour le Christ de déposer son âme et de la reprendre que pour un autre de s’endormir et de se réveiller. Mais pourquoi [cette mort] leur a-t-elle été imputée ? Parce qu’ils ont fait ce qui était en leur pouvoir.
Un
premier cri avait été mentionné plus haut, v. 46. Quelles paroles s'échappèrent alors des lèvres du Sauveur en
même temps que son dernier soupir ? S. Matthieu ne le dit pas ; mais nous l'apprenons dans la narration de S.
Luc, 23, 46 : « Jésus s'écria d'une voix forte: Père, je remets mon esprit entre tes mains. Et, en disant ces
paroles, il expira. » - Un grand cri. Les trois synoptiques ont pris soin de noter ce trait extraordinaire qui
prouve, comme le disaient déjà les Pères, que Notre-Seigneur mourut librement, de son plein gré. - Il rendit
l'esprit. Ici, il faut aimer, adorer et se taire.
Jésus… rendit l’esprit. C’était le vendredi 14 nisan, à trois heures de l’après-midi, c’est-à-dire, selon les calculs les plus probables, le vendredi 7 avril de l’an 30 de notre ère.