Matthieu 4, 22
Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.
Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.
En renonçant à leur profession et au foyer paternel, ils nous apprennent que pour suivre Jésus-Christ, il faut être libre des sollicitudes de cette vie, aussi bien que des habitudes de la vie de famille.
On peut y voir aussi une figure des quatre Évangélistes.
Avant de rien faire, avant de rien dire, Jésus-Christ appelle ses Apôtres, car il veut qu'aucune de ses paroles, qu'aucune de ses actions ne soit cachée pour eux ; et qu'ils puissent dire plus tard avec confiance : " Nous ne pouvons point taire ce que nous avons vu et entendu. " C'est ce que veut exprimer l'Évangéliste : " Jésus, marchant sur les bords de la mer de Galilée. "
Il les surprend alors qu'il vient les appeler, au milieu de leurs occupations, parce qu'il veut nous apprendre, que pour le suivre, il faut quitter toute autre affaire. C'est pour cela qu'il est dit : " Qu'ils jetaient alors leurs filets dans la mer. " C'était en effet, une des occupations de leur état, comme l'Évangéliste le remarque : " Car ils étaient pécheurs. "
Leur profession était aussi un symbole de leur dignité future, car de même que le pêcheur lorsqu'il jette ses filets dans l'eau, ignore quels poissons il va prendre, ainsi le prédicateur lorsqu'il jette sur le peuple qui l'écoute le filet de la parole divine, ignore quels sont ceux qui vont venir à Dieu, c'est Dieu lui-même qui excite ceux qui doivent embrasser sa doctrine.
C'est-à-dire docteurs ; et c'est avec le filet de la parole de Dieu que vous devez prendre et retirer les hommes de ce monde si fécond en tempêtes et en naufrages, où les hommes ne marchent pas, mais sont entraînés avec violence, parce que le démon se sert de l'attrait du plaisir pour les précipiter dans cet abîme de maux, ou les hommes se dévorent les uns les autres, comme on voit dans la. mer les plus petits poissons dévorés par les grands ; prenez-les donc afin de les faire vivre sur la terre, lorsqu'ils seront devenus les membres du corps de Jésus-Christ.
Ces disciples ont suivi Jésus-Christ, non pour l'honneur attaché au titre de docteur, mais pour les fruits qu'ils espéraient produire, car ils savaient combien est précieuse l'âme de l'homme, combien Dieu désire son salut, et quelle en est la récompense.
Ils ajoutèrent donc foi à de si magnifiques promesses, et ils crurent qu'ils prendraient les autres dans les mêmes fileta de cette parole qui les avaient pris eux-mêmes.
Pleins de ces désirs, ils abandonnèrent tout pour suivre Jésus-Christ et nous apprirent par ce sacrifice qu'on ne peut à la fois posséder les choses de la terre, et parvenir à la possession parfaite des biens célestes.
C'est avec raison que Jésus a fait reposer les fondements de son Église sur la charité fraternelle, afin que la sève sortant avec abondance de cette racine pût se répandre dans toutes les branches. Et ce n'est pas seulement ici la charité produite par la grâce, mais l'affection naturelle pour que la charité reçoive ce double et ferme appui de la nature et de la grâce ; voilà pourquoi l'Évangéliste dit qu'ils étaient frères. C'est ainsi que Dieu avait agi dans l'Ancien Testament en posant les bases de l'ancienne loi sur les deux frères Moise et Aaron. Or, comme la grâce est plus abondante dans le Nouveau Testament que dans l'Ancien, Dieu fait reposer les fondements de la société chrétienne sur deux sentiments de cette nature, tandis que le premier peuple ne reposait que sur un seul. " Il vit Jacques, " fils de Zébédée, dit l'Évangéliste, et Jean son frère, raccommodant leurs filets, " c'était un signe de très-grande pauvreté, car s'ils étaient obligés de raccommoder leurs vieux filets, c'est qu'ils ne pouvaient en acheter de neufs. Nous avons encore ici une preuve de leur amour filial ; dans leur pauvreté, ils n'abandonnent pas leur père, mais ils l'emmènent avec eux dans leur barque, non pour les aider dans leur travail, mais pour consoler eux-mêmes sa vieillesse par leur présence.
Tout annonce ici une vertu éminente, supporter facilement la pauvreté, vivre d'un travail honnête, être unis intimement par l'amour de la vertu, avoir leur père avec eux, et subvenir à ses besoins.
Devons-nous estimer que les premiers furent plus actifs que les derniers dans le ministère de la prédication, parce que les uns jettent leurs filets à la mer, tandis que les autres les raccommodent ? nous n'oserions le dire, Jésus-Christ seul connaît la différence qui peut exister entre eux.
Peut-être les uns nous sont-ils représentés jetant leurs filets à cause de Pierre qui prêche l'Évangile, mais sans le laisser par écrit, tandis que nous voyons les autres réparer leurs filets en figure de Jean qui a composé son Évangile.
Ils étaient concitoyens d'une même ville, l'amitié les unissait, ils avaient la même profession, ils s'aimaient comme des frères, et Jésus ne voulut pas que, réunis en tant de points, ils fussent séparés dans leur vocation.
En les appelant, il ne leur promit rien comme aux premiers, car l'obéissance leur avait ouvert la voie. Ils avaient d'ailleurs entendu parler souvent de lui, à cause des liens du sang et de l'amitié qui les unissaient entre eux.
Celui qui veut suivre Jésus-Christ doit renoncer à trois choses : aux oeuvres de la chair qui sont figurées par les filets des pêcheurs ; aux biens de ce monde dont la barque est le symbole ; aux affections de la famille signifiées par le père des deux apôtres. Ils laissent donc une barque, pour devenir les pilotes du vaisseau de l'Église ; ils laissent leurs filets, car ils ne veulent plus apporter de poissons dans les villes de la terre, mais conduire les hommes dans la cité des cieux ; ils laissent un père, pour devenir eux-mêmes les pères spirituels du monde entier.
Avant d'aller combattre l'ennemi, un roi songe tout d'abord à réunir son armée, et c'est avec elle qu'il entre en campagne. C'est ainsi que notre Seigneur avant d'entreprendre la guerre contre le démon rassemble tout d'abord ses apôtres, et commence ensuite à prêcher l'Évangile : c'est ce qu'indique le texte sacré : " Et Jésus allait par toute la Galilée. "
Ces peuples étaient trop faibles pour venir trouver le médecin, ce médecin dévoué allait donc de toutes parts chercher ces malades atteints d'infirmités mortelles. Le Seigneur parcourait toutes les contrées, mais les pasteurs qui ne sont préposés qu'à la garde d'un seul pays, doivent au moins parcourir en détail toutes les infirmités du peuple qui leur est confié, afin de pouvoir appliquer à chacune d'elles le remède qui lui convient, et que l'Église tient en réserve.
Jésus entre dans les synagogues des Juifs, et il y répand les paroles de la doctrine céleste. Il veut que les paroles du Maître parviennent aux oreilles d'un plus grand nombre, afin que leurs coeurs soient excités à embrasser raisonnablement la foi, ou que par un aveuglement inexcusable ils rejettent à leur grand préjudice une doctrine aussi salutaire. Car l'Évangile est une vive lumière, qu'on ne peut sans crime cacher sous le boisseau, ce que Jésus a expressément défendu. Par là aussi il faisait voir qu'il ne venait pas se mettre en opposition avec Dieu, qu'il n'était pas un apôtre d'erreurs, mais qu'il était en parfaite harmonie avec son Père.
Ou bien, il enseignait les vertus naturelles que la raison nous fait connaître, la chasteté, l'humilité et autres vertus semblables, qui sont des biens réels au jugement de tous. S'il faut en faire la matière de l'enseignement, ce n'est point tant pour les faire connaître, que pour en réveiller le désir dans les coeurs ; car sous l'action prédominante des plaisirs de la chair, la science de la justice naturelle tombe en oubli et s'endort en quelque sorte au rond des coeurs. Or, lorsque celui qui enseigne, condamne ces inclinations charnelles, sa parole ne donne pas de nouvelles connaissances, elle rappelle celles qu'on avait oubliées. Il prêchait l'Évangile en annonçant des biens dont les anciens n'avaient jamais entendu parler clairement, tels que le bonheur du ciel, la résurrection des morts et l'autres vérités semblables. Ou bien il enseignait en montrant que les prophéties s'accomplissaient en lui, et il prêchait l'Évangile en faisant connaître les biens futurs dont il devait nous mettre en possession.
Ou bien la langueur figure certaines passions de l'âme, comme l'avarice, l'impureté, et autres de ce genre ; l'infirmité serait la figure de l'infidélité, qui est le mal de ceux qui sont infirmes dans la foi. Ou bien les langueurs sont les maladies plus graves du corps, et les infirmités les plus légères. Or Jésus guérissait les maladies du corps par sa puissance divine, et celles de l'âme par ses pieux entretiens. Il enseigne d'abord, et puis il guérit, et cela pour deux raisons : d'abord pour commencer par le plus nécessaire, car les pieux entretiens édifient l'âme, ce que ne font pas les miracles ; en second lieu parce que la doctrine s'appuie sur les miracles et non pas les miracles sur la doctrine.
Il est à remarquer que toutes les fois que Dieu promulgue une loi, il opère des miracles, et les donne comme gages de sa puissance à ceux qui doivent recevoir sa loi. Avant de créer l'homme il avait tiré le monde du néant, et ce n'est qu'après ce miracle de sa puissance qu'il lui intime ses ordres dans le paradis. Avant de donner sa loi à Noé, il le rend témoin de grands prodiges ; avant de promulguer la loi ancienne, il opère également des miracles aux yeux des Juifs. C'est ainsi qu'au moment de promulguer cette loi nouvelle et sublime, il en confirme la vérité par l'autorité des miracles. Comme le royaume qu'il prêchait était invisible, il le rend manifeste par des prodiges extérieurs et sensibles.
Remarquez la réserve de l'Évangéliste, qui sans parler de chaque guérison en particulier se contente de les renfermer toutes, quelque nombreuses qu'elles soient, dans ces expressions si courtes : " Et ils lui présentèrent tous ceux qui étaient malades. "
Dans d'autres endroits nous lisons : " Il en guérit beaucoup : " ici l'Évangéliste dit simplement : " Et il les guérit, " pour marquer qu'il les guérit tous sans exception, comme ferait un nouveau médecin, qui, à son arrivée dans une ville prendrait soin de tous ceux qu'on lui présenterait pour établir sa réputation.
Il n'exige d'aucun d'eux la foi, parce qu'il n'avait pas encore donné de preuves de sa puissance. D'ailleurs en venant de si loin, et en apportant leurs malades, ils avaient témoigné une foi assez grande.
Les démons avaient observé cette influence de la lune, et en prenaient occasion de blasphémer l'ouvrage de Dieu et de faire remonter jusqu'à lui ce blasphème.
Il ne choisit ni des rois, ni des sénateurs, ni des philosophes, ni des orateurs, mais des plébéiens, des pauvres, des pêcheurs sans instruction.
S'il avait choisi des savants, peut-être auraient-ils dit qu'ils étaient choisis en considération de leur science. Mais Notre-Seigneur Jésus-Christ qui a voulu briser l'orgueil des superbes, n'a point cherché à prendre des pêcheurs par des orateurs, mais c'est par des pêcheurs qu'il a gagné des empereurs. Cyprien est un grand orateur, mais nous voyons avant lui Pierre qui n'était que pêcheur.
On peut-être surpris de ce que saint Jean rapporte que c'est sur les bords du Jourdain, et non dans la Galilée qu'André a suivi le Sauveur avec un autre dont il tait le nom, et que ce n'est que par la suite que ce dernier reçut de lui le nom de Pierre. Les trois autres Évangélistes s'accordent assez sur la vocation des apôtres qui eut lieu au moment où ils pêchaient, du moins saint Matthieu et saint Marc, car saint Luc ne nomme pas André, laissant toutefois supposer qu'il était dans la même barque. Il y a encore ici une différence ; d'après le récit de saint Luc, le Seigneur n'adresse qu'à Pierre ces paroles : " Dès ce moment vous serez pêcheur d'hommes, " tandis que d'après saint Matthieu et saint Marc, Jésus les aurait dites à tous les deux. Mais elles ont pu très bien être dites d'abord à Pierre seulement, comme le rapporte saint Luc, et plus tard à tous les deux, ainsi que le racontent les cieux autres Évangélistes. Ce que nous avons dit du récit de saint Jean, demande toute notre attention, car il y a dans ce récit de grandes différences pour le temps, pour les lieux, et pour la vocation elle-même des Apôtres. Il faut donc entendre que Pierre et André ne attachèrent pas au Seigneur pour ne plus s'en séparer, du jour où ils le virent sur les bords du Jourdain ; ils connurent simplement alors qui il était, et ils retournèrent à leurs occupations pleins d'admiration pour sa personne. Peut-être aussi saint Matthieu récapitule en cet endroit ce qu'il avait omis, car sans marquer aucune distinction de temps, il dit : " Or Jésus marchant sur le bord de la mer. " On peut demander encore pourquoi les apôtres sont appelés deux par deux, d'après le récit de saint Matthieu et de saint Marc, tandis que saint Luc rapporte que Jacques et Jean ont été appelés comme les compagnons de Pierre et pour venir à son aide (cf. Lc 5, 6), et qu'ils ont suivi Jésus-Christ après avoir ramené leurs barques à bord. Il faut donc admettre que le fait raconté par saint Luc s'est passé en premier lieu, et qu'alors les Apôtres ont repris leurs occupations ordinaires, la pêche des poissons. Jésus en effet n'avait pas encore dit à Pierre cette parole : " Qu'il ne prendrait plus jamais de poissons, " puisqu'il en prit encore après la résurrection, mais seulement qu'il prendrait des hommes. Ce que racontent saint Matthieu et saint Marc n'eut lieu que plus tard, et les Apôtres en ramenant alors leurs barques à bord pour le suivre, n'avaient pas la pensée de reprendre leurs occupations, mais celle d'obéir au Seigneur qui leur commandait de le suivre.
Les démons sont attirés par des attraits conformes à leur nature, à faire leur habitation dans la créature qui n'est pas leur oeuvre, mais oeuvre de Dieu. Ils ne sont pas attirés comme les animaux par des appétits sensuels, mais comme les esprits par des signes ou chacun d'eux trouve son plaisir.
La mer de Galilée n'est autre que le lac de Génésareth, la mer de Tibériade est le lac des Salines.
Il les vit plutôt des yeux de l'esprit que des yeux du corps, et c'est leurs coeurs qui étaient l'objet de ses regards.
Le Seigneur parle de ces pêcheurs par la bouche du prophète Jérémie (Jr 16), en ces termes : " Je vous enverrai mes pêcheurs, et ils vous prendront dans leurs filets. " C'est pour cela que l'Évangéliste ajoute ici ces paroles de Notre-Seigneur : " Venez à ma suite. "
Ou bien encore dans ces quatre apôtres nous pouvons voir une figure des quatre vertus principales, dans Pierre la prudence, à cause de la connaissance qu'il a de Dieu, dans André la justice, à cause de l'énergie de ses actes, dans Jacques la force, parce qu'il supplante le diable, et dans son frère Jean la tempérance, comme effet de la grâce divine.
Les docteurs trouvent ici le modèle qu'ils doivent imiter, il est dit de Jésus qu'il parcourait toute la Galilée, pour leur apprendre à fuir l'oisiveté.
Ces paroles : " Par toute la Galilée, " apprennent aux pasteurs à ne jamais faire acception de personnes ; les paroles suivantes : " En enseignant " à ne point parcourir la terre sans produire de fruits, et ces autres : " Dans les synagogues " de préférer l'utilité du plus grand nombre à l'intérêt de quelques-uns seulement.
Dans le sens mystique, la mer figure le monde à cause de l'amertume de ses eaux et de l'agitation de ses flots ; le mot Galilée signifie mouvement rapide ou roue, et il exprime le cours rapide des choses humaines. Jésus a marché sur les bords de la mer, lorsqu'il est venu à nous par son incarnation, car ce n'est pas la chair du péché, mais la ressemblance (cf. Rm 8, 3) de cette chair qu'il a prise dans le sein de la Vierge. Les deux frères désignent les deux peuples qui tous les deux ont Dieu pour créateur et pour père ; et ce Dieu les vit, lorsqu'il tourna vers eux les regards de sa miséricorde. En effet, Pierre, qui signifie celui qui connaît et qui est appelé Simon, c'est-à-dire celui qui obéit, est la figure du peuple juif qui puisa dans la loi la connaissance de Dieu, et obéit à ses préceptes. André veut dire fortou d'un aspect agréable, et il représente la gentilité qui persévère courageusement dans la foi aussitôt qu'elle a reçu la connaissance de Dieu. Dieu appela ces peuples lorsqu'il envoya ses prédicateurs dans le monde, en leur disant : " Venez à ma suite, " c'est-à-dire laissez celui qui vous trompe, pour suivre celui qui vous a créé. Dans l'un comme dans l'autre peuple, Dieu choisit des pêcheurs d'hommes, c'est-à-dire des prédicateurs qui, laissant leur barque, figure des désirs de la chair, et leurs filets, c'est-à-dire les convoitises du siècle, ont suivi aussitôt le Sauveur. Jacques représente aussi le peuple juif qui a supplanté le démon et ruiné son empire par la connaissance du vrai Dieu. Jean est la figure du peuple païen qui doit uniquement son salut à la grâce. Zébédée, que ses enfants abandonnent, et dont le nom signifie celui qui fuit, celui qui tombe, représente le monde qui passe, et le démon précipité du haut des cieux. Pierre et André, qui jettent leurs filets dans la mer, figurent aussi ceux qui dès leurs premières années jettent loin de la barque de leur corps les filets de la concupiscence charnelle pour suivre le Seigneur. Jacques et Jean qui raccommodent leurs filets représentent ceux qui avant d'être punis des fautes qu'ils ont commises, viennent à Jésus-Christ pour recouvrer ce qu'ils avaient perdu.
Les paroles suivantes : " Prêchant l'Évangile du royaume, " nous enseignent qu'il ne faut prêcher ni erreurs ni fables mensongères. Les deux termes : " Enseignant et prêchant, " ne sont pas synonymes ; enseigner a pour objet les choses présentes ; prêcher, les choses futures ; Notre-Seigneur enseignait les commandements qu'il fallait observer actuellement, et il prêchait les promesses futures.
Les paroles qui suivent : " Guérissant toutes les langueurs et toutes les infirmités parmi le peuple, " apprennent aux prédicateurs que leur enseignement doit s'appuyer sur leurs vertus ; la langueur exprime ici les maladies de l'âme, l'infirmité celles du corps.
Nous devons entendre par là toutes les infirmités si variées, mais les plus légères. Lorsqu'il ajoute : " Et tous ceux qui étaient malades et affligés de diverses sortes de maux, " il veut parler de ceux que l'Évangéliste spécifie plus bas : " Les possédés, les lunatiques, etc. "
Les lunatiques sont ainsi appelés, parce qu'ils sont plus souffrants à l'époque de la croissance et de la décroissance de la lune.
Ni Pierre ni André, n'avaient vu Jésus-Christ opérer des miracles ; ils ne l'avaient pas entendu parler des récompenses éternelles, et cependant, sur le seul commandement qu'il leur fait, ils abandonnent tout ce qu'ils paraissent posséder : " Aussitôt, ils quittèrent leurs filets, et le suivirent. " Ce qu'il faut apprécier ici, c'est plutôt la disposition de leur âme que l'importance de ce qu'ils abandonnent. C'est beaucoup laisser que de ne se réserver rien, c est beaucoup abandonner que de renoncer non seulement à ce qu'on possède, mais à tout ce qu'on pourrait désirer encore. Pour suivre Jésus-Christ, ils abandonnent donc réellement tout ce qu'ils auraient pu désirer, en ne s'attachant pas à lui. Le Seigneur se contente de nos biens extérieurs, quelque peu considérables qu'ils soient ; il regarde moins à la grandeur des biens qu'on lui offre qu'à la générosité du sentiment qui les lui sacrifie. Le royaume de Dieu est d'un prix inestimable, il vaut tout ce que vous avez.
Il nous enseigne par là d'une manière implicite que celui qui n'a pas la charité fraternelle ne doit pas se charger du ministère de la prédication, car il y a deux préceptes de la charité, et il faut au moins deux personnes pour qu'elle puisse s'exercer.
Les deux barques figurent les deux Églises, l'Église de la circoncision, et l'Église de la gentilité. Tout fidèle aussi peut devenir Simon par son obéissance à Dieu ; Pierre, par la connaissance et l'aveu de son péché ; André, par son courage dans les épreuves ; Jacques, par son zèle à détruire et supplanter le mal.
La Syrie s'étend de l'Euphrate à la Grande Mer, et de la Cappadoce à l'Égypte, et elle comprend la province de Palestine habitée par les Juifs.
Les paralytiques sont ceux dont la force corporelle est comme dissoute, car le mot grec se traduit en latin par dissolutio, dissolution.
On peut la diviser en quatre classes ; les disciples qui le suivent attirés par ses divines leçons, d'autres par les guérisons qu'il opère, ceux-ci par sa réputation et par un motif de curiosité pour voir si ce que l'on disait de lui était vrai, ceux-là par l'envie, et par le désir de le prendre en faute sur quelque point et de l'accuser. Au sens mystique, la Syrie veut dire superbe ; la Galilée inconstante ou la roue, c'est-à-dire le démon et le monde dominé par l'orgueil, et toujours porté à rouler dans les choses basses. La prédication y fait connaître le nom du Christ. Les possédés du démon ce sont les idolâtres ; les lunatiques, ceux qui sont inconstants, les paralytiques, les paresseux et les dissolus.
La Glose
C'est avec raison que Jésus va sur les bords de la mer, puisqu'il veut y prendre des pécheurs dans ses filets. Le texte ajoute : " Il vit deux frères ; Simon, appelé Pierre, et André son frère.
Venez, non pas tant en me suivant extérieurement, qu'en m'aimant, et en m'imitant, et je vous ferai pêcheurs d'hommes.
Ces disciples nous offrent donc le premier exemple du renoncement aux biens de la terre pour l'amour de Jésus-Christ. Le fait suivant nous donnera l'exemple du sacrifice fait à Dieu des affections de la chair. Nous lisons en effet : " Et de là s'avançant, il vit deux autres frères. " Remarquez qu'il les appelle deux par deux, comme plus tard nous lisons qu'il les envoie prêcher deux à deux.
Jean vient ensuite pour que tout soit attribué à la grâce. Il n'est question ici que de la vocation de quatre apôtres comme figure des prédicateurs qui seront appelés des quatre parties du monde.
Les prédicateurs doivent avoir un bon témoignage du dehors, autrement le mépris de leur personne rejaillit sur leur enseignement, voilà pourquoi l'Évangéliste ajoute : " Et sa réputation se répandit par toute la Syrie. "
La langueur est une maladie chronique, et la douleur est une maladie aigue, comme une douleur de côté ou autre de cette nature ; ceux qu'il appelle possédés sont ceux qui étaient tourmentés par le démon.
La multitude qui suit le Seigneur appartient à l'Église, qui dans un sens spirituel est tout à la fois la Galilée qui passe du vice à la vertu, la Décapole, à cause des dix commandements qu'elle doit observer ; Jérusalem et la Judée, parce qu'elle reçoit la double lumière de la vision de paix et de la confession de la foi. Elle est située au delà du Jourdain parce qu'après avoir traversé les eaux du baptême, elle entre dans la terre promise. — Ou bien cette multitude qui suit le Seigneur vient de la Galilée, c'est-à-dire de l'inconstance du monde, de la Décapole, région qui comprenait dix villes, et qui figure les transgresseurs du Décalogue ; de Jérusalem, parce qu'ils étaient retenus par les douceurs d'une paix innocente, de la Judée, c'est-à-dire d'une doctrine diabolique ; et d'au delà du Jourdain parce qu'ils vivaient auparavant au sein de l'idolâtrie, et que ce n'est qu'en traversant les eaux du baptême qu'ils sont arrivés jusqu'à Jésus-Christ.
484. Vient ensuite, à propos de l’obéissance : EUX LAISSANT FILETS ET PÈRE LE SUIVIRENT.
485. Note que les deux premiers n’ont laissé que leur bateau, mais ceux-ci filets, bateau et père, ce qui signifie qu’à cause du Christ nous devons renoncer à toutes les occupations terrestres, qui sont représentées par le filet, 2 Tm 2, 4 : Aucun militant de Dieu ne s’implique dans les affaires du monde ; aux richesses ou possessions, qui sont représentées par le bateau, Mt 19, 21 : Si tu veux être parfait, va et vends tout ce que tu as, et donne[-le] aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel, et viens, suis-moi ; à l’affection charnelle, qui est représentée par le père, Ps 44, 11 : Oublie ton peuple et la maison de ton père. Mais mystiquement Zébédée représente le monde, il se traduit «flot impétueux».
486. Mais ici se pose une question : il semble qu’ils péchèrent en abandonnant leur père vieux et pauvre, car les fils sont tenus de subvenir aux besoins de leurs parents. Et d’une manière générale, on se demande s’il est permis à quelqu’un de laisser ses parents dans le plus grand besoin en entrant en religion. Il faut dire que jamais une décision ne porte préjudice à un commandement. Ceci, honore ton père et ta mère, Ex 20, 12, c’est un commandement, et c’est pourquoi, si le père ne peut en aucune façon vivre sans le soutien de son fils, le fils ne doit pas entrer en religion. Mais ce n’était pas le cas pour Zébédée : il pouvait s’aider lui-même et il avait le nécessaire.
487. Il y a aussi une question sur le texte : Matthieu paraît ici contredire Jean et Luc, car Jn 1, 28 dit qu’ils ont été appelés au bord du Jourdain, et ici [Matthieu] dit [que c’était] au bord de la mer de Galilée. En outre, Lc 5, 10 dit qu’il appela en même temps Pierre et André [d’une part], Jacques et Jean [d’autre part], bien qu’[ici] il ne soit pas fait mention des deux premiers, parce qu’on pense qu’ils étaient là. En outre, il est dit là [chez Luc] qu’[ils furent appelés] tous en même temps, et ici [chez Matthieu] que [ce fut] séparément.
488. Mais il faut savoir que l’appel des disciples fut triple. D’abord ils furent appelés à l’intimité avec le Christ et cela est dit en Jn 1 [35-50] ; cela [se produisit aussi] dans la première année de la prédication du Christ. Cela ne s’oppose pas à ce qui est dit après : Ses disciples montèrent avec lui à Cana de Galilée [Jn 2, 2], car selon Augustin, à cette époque ils n’étaient pas disciples, ils étaient futurs [disciples]. C’est comme si on disait : «L’apôtre Paul est né à Tarse en Cilicie» : pourtant à ce moment-là, il n’était pas apôtre ! Ou bien il faut dire qu’il parle d’autres disciples, qui sont tous appelés croyants au Christ. Deuxièmement ils furent appelés à la condition de disciples, et il en est question au chapitre 5 de Luc. Le troisième appel fut d’adhérer totalement au Christ, et c’est de celui-là qu’il est question ici, ce qui est clair, d’après Augustin, car Lc 5, 11 traite de ce sujet : et ramenant les bateaux à terre, donc ils avaient un bateau et en prenaient soin comme s’ils allaient y retourner. Mais ici [Matthieu] dit : EUX LAISSANT TOUT, etc. Et c’est pourquoi il faut dire qu’il parle ici de suivre jusqu’au bout.
485. Note que les deux premiers n’ont laissé que leur bateau, mais ceux-ci filets, bateau et père, ce qui signifie qu’à cause du Christ nous devons renoncer à toutes les occupations terrestres, qui sont représentées par le filet, 2 Tm 2, 4 : Aucun militant de Dieu ne s’implique dans les affaires du monde ; aux richesses ou possessions, qui sont représentées par le bateau, Mt 19, 21 : Si tu veux être parfait, va et vends tout ce que tu as, et donne[-le] aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel, et viens, suis-moi ; à l’affection charnelle, qui est représentée par le père, Ps 44, 11 : Oublie ton peuple et la maison de ton père. Mais mystiquement Zébédée représente le monde, il se traduit «flot impétueux».
486. Mais ici se pose une question : il semble qu’ils péchèrent en abandonnant leur père vieux et pauvre, car les fils sont tenus de subvenir aux besoins de leurs parents. Et d’une manière générale, on se demande s’il est permis à quelqu’un de laisser ses parents dans le plus grand besoin en entrant en religion. Il faut dire que jamais une décision ne porte préjudice à un commandement. Ceci, honore ton père et ta mère, Ex 20, 12, c’est un commandement, et c’est pourquoi, si le père ne peut en aucune façon vivre sans le soutien de son fils, le fils ne doit pas entrer en religion. Mais ce n’était pas le cas pour Zébédée : il pouvait s’aider lui-même et il avait le nécessaire.
487. Il y a aussi une question sur le texte : Matthieu paraît ici contredire Jean et Luc, car Jn 1, 28 dit qu’ils ont été appelés au bord du Jourdain, et ici [Matthieu] dit [que c’était] au bord de la mer de Galilée. En outre, Lc 5, 10 dit qu’il appela en même temps Pierre et André [d’une part], Jacques et Jean [d’autre part], bien qu’[ici] il ne soit pas fait mention des deux premiers, parce qu’on pense qu’ils étaient là. En outre, il est dit là [chez Luc] qu’[ils furent appelés] tous en même temps, et ici [chez Matthieu] que [ce fut] séparément.
488. Mais il faut savoir que l’appel des disciples fut triple. D’abord ils furent appelés à l’intimité avec le Christ et cela est dit en Jn 1 [35-50] ; cela [se produisit aussi] dans la première année de la prédication du Christ. Cela ne s’oppose pas à ce qui est dit après : Ses disciples montèrent avec lui à Cana de Galilée [Jn 2, 2], car selon Augustin, à cette époque ils n’étaient pas disciples, ils étaient futurs [disciples]. C’est comme si on disait : «L’apôtre Paul est né à Tarse en Cilicie» : pourtant à ce moment-là, il n’était pas apôtre ! Ou bien il faut dire qu’il parle d’autres disciples, qui sont tous appelés croyants au Christ. Deuxièmement ils furent appelés à la condition de disciples, et il en est question au chapitre 5 de Luc. Le troisième appel fut d’adhérer totalement au Christ, et c’est de celui-là qu’il est question ici, ce qui est clair, d’après Augustin, car Lc 5, 11 traite de ce sujet : et ramenant les bateaux à terre, donc ils avaient un bateau et en prenaient soin comme s’ils allaient y retourner. Mais ici [Matthieu] dit : EUX LAISSANT TOUT, etc. Et c’est pourquoi il faut dire qu’il parle ici de suivre jusqu’au bout.
S'avançant plus loin. Un second
triomphe accompagne de près le premier, et deux autres disciples, également unis par les liens du sang, se
mettent généreusement à la suite du Messie. - Jacques. C’était l’aîné ; à son nom, qui est identique à celui de
l’ancêtre par excellence d’Israël, l’évangéliste ajoute le nom de son père, Zébédée (sous-entendu « fils »),
pour le distinguer de S. Jacques le Mineur, fils d’Alphée. - Jean. Jean signifie en hébreu, comme nous
l’avons dit précédemment, « Jéhova a fait grâce » : Jésus étant le Jéhova du Nouveau Testament, son disciple
privilégié pouvait-il être désigné par une appellation plus heureuse ? - Laissant leurs filets et leur père. Sur
un signe de Jésus, S. Jacques et S. Jean abandonnent tout, même leur père. C’est à dessein que l’évangéliste a relevé ce trait admirable de renoncement, qui a rempli bien des âmes de courage au moment de déchirantes
séparations réclamées par la voix divine. - Jacques et Jean étaient sans doute, eux aussi, d’anciens disciples
du Précurseur. On croit du moins généralement que l’apôtre favori du Christ se désigne lui-même d’une
manière indirecte lorsqu’il raconte la première entrevue de Notre-Seigneur avec S. André, Cf. Joan. 1, 35 et
ss.