Matthieu 4, 23

Jésus parcourait toute la Galilée ; il enseignait dans leurs synagogues, proclamait l’Évangile du Royaume, guérissait toute maladie et toute infirmité dans le peuple.

Jésus parcourait toute la Galilée ; il enseignait dans leurs synagogues, proclamait l’Évangile du Royaume, guérissait toute maladie et toute infirmité dans le peuple.
Saint Thomas d'Aquin
489. La coutume des rois est de rassembler une armée avant de partir en guerre. De même le Christ, après avoir rassemblé une armée d’apôtres, part en guerre contre le diable grâce à sa fonction de prédicateur, pour l’expulser du monde. C’est pourquoi il s’agit ici de l’enseignement et de la prédication du Christ.

490. D’abord est présentée la prédication du Christ ; deuxièmement, l’effet de la prédication, en cet endroit : ET SA RENOMMÉE SE RÉPANDIT DANS TOUTE LA SYRIE, etc.

491. À propos du premier point, [Matthieu] touche trois choses : le zèle de l’enseignant, le mode de l’enseignement et la confirmation de l’enseignement proposé.

492. Et le zèle est montré en deux choses, car il ne cherchait pas sa propre tranquillité : IL FAISAIT LE TOUR ; Rm 12, 11 : D’un zèle sans nonchalance, et, en second lieu, il ne faisait pas acception des personnes, des pays ni des villes, mais FAISAIT LE TOUR DE TOUTE LA GALILÉE, sans faire de différence, Mc 1, 38 : Allons dans les villes les plus proches pour que là aussi je prêche ; Ps 102, 22 : En tout lieu de son domaine.

Le mode [est abordé] en cet endroit : ENSEIGNANT DANS LES SYNAGOGUES. [Matthieu] dit deux choses : ENSEIGNANT …ET PRÊCHANT. ENSEIGNANT ce qu’il faut faire dans le présent, ET PRÊCHANT sur les choses futures. Ou bien ENSEIGNANT ce qui touche à l’instruction morale, Is 48, 17 : Moi le Seigneur je t’enseigne les choses utiles, ET PRÊCHANT les choses futures, Is 52, 7 : Qu’ils sont beaux sur la montagne, les pieds de celui qui annonce et prêche la paix, qui annonce le bien, qui prêche le salut. Ou bien ENSEIGNANT les lois naturelles, car en théologie sont transmises certaines choses – comme la justice, et choses de ce genre – que dicte la raison naturelle, et pour celles-là il dit : ENSEIGNANT ; et certaines qui dépassent la raison – comme le mystère de la Trinité, et autres de ce genre – et pour celles-là il dit : PRÊCHANT.

493. Mais il y a une objection tirée de ce que dit la Glose, qu’il enseignait les lois naturelles comme la chasteté, l’humilité et choses de ce genre. En effet les vertus naturelles ne paraissent pas pouvoir être appelées des vertus, car les vertus existent par la grâce. Et il faut dire que l’inclination et le commencement sont naturels, mais que la perfection, qui rend l’homme précieux, vient par la grâce, par le soutien de l’ordre social et par l’entraînement personnel.

494. DANS LEURS SYNAGOGUES. Note deux choses : [le Seigneur] cherchait la foule pour que sa prédication ait plus d’efficacité, Ps 34, 18 : Je te proclamerai dans la grande assemblée. De plus, il prêchait aux seuls Juifs, Ac 13, 46 : C’est à vous d’abord qu’il faut que la parole de Dieu soit prêchée. ET PRÊCHANT LA BONNE NOUVELLE DU ROYAUME : pas des fables ou des curiosités, mais ce qui concerne le royaume de Dieu, et ce qui pouvait être utile aux gens.

495. Ensuite la prédication est confirmée par des miracles, Mc 16, 20 : Ils partirent prêcher partout, le Seigneur agissant avec eux et confirmant la parole par les signes qui la suivaient. Ainsi, GUÉRISSANT. MALADIE peut se rapporter aux maladies physiques, FAIBLESSE aux maladies de l’âme, car les maladies de l’âme ne sont pas moindres que celles du corps. Ou bien MALADIE désigne les maladies graves et durables, FAIBLESSE les autres sortes, Ps 102, 3 : Celui qui guérit toutes tes maladies ; Si 10, 10 : Le médecin coupe une brève faiblesse. Est aussi donné à comprendre que les prédicateurs doivent confirmer leur enseignement par des œuvres, sinon par des miracles, [du moins] par une vie vertueuse, Rm 15, 18 : Je n’ose parler de ce que le Christ ne fait pas par moi, en vue de l’obéissance des païens, en parole et en actes, par la vertu des signes et des prodiges, par la vertu de l’Esprit Saint.
Lansperge le Chartreux
Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière (Is 9,1). Mes frères, nul n'ignore que nous sommes tous nés dans les ténèbres et que nous y avons vécu autrefois. Mais faisons en sorte de ne plus y rester, maintenant que le soleil de justice s'est levé pour nous.

Le Christ est donc venu illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et l'ombre de la mort, pour guider leurs pas dans le chemin de la paix. De quelles ténèbres parlons-nous? Tout ce qui se trouve dans notre intelligence, dans notre volonté ou dans notre mémoire, et qui n'est pas Dieu ou n'a pas sa source en Dieu, autrement dit tout ce qui en nous n'est pas à la gloire de Dieu et fait écran entre Dieu et l'âme, est ténèbres.

Aussi le Christ, ayant en lui la lumière, nous l'a-t-il apportée pour que nous puissions voir nos péchés et haïr nos ténèbres. Vraiment, la pauvreté qu'il a choisie quand il n'a pas trouvé de place à l'hôtellerie, est pour nous la lumière à laquelle nous pouvons connaître dès maintenant le bonheur des pauvres en esprit, à qui appartient le Royaume des cieux.

L'amour dont le Christ a témoigné en se consacrant à notre instruction et en s'exposant à endurer pour nous les épreuves, l'exil, la persécution, les blessures et la mort sur la croix, l'amour qui finalement l'a fait prier pour ses bourreaux, est pour nous la lumière grâce à laquelle nous pouvons apprendre à aimer aussi nos ennemis.

Elle est pour nous lumière, l'humilité avec laquelle il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur (Ph 2,7), et, refusant la gloire du monde, voulut naître dans une étable plutôt que dans un palais et subir une mort honteuse sur un gibet. Grâce à cette humilité nous pouvons savoir combien détestable est le péché d'un être de limon, un pauvre petit homme de rien, lorsqu'il s'enorgueillit, se glorifie et ne veut pas obéir, tandis que nous voyons le Dieu infini, humilié, méprisé et livré aux hommes.

Elle est aussi pour nous lumière, la douceur avec laquelle il a supporté la faim, la soif, le froid, les insultes, les coups et les blessures, lorsque comme un agneau il a été conduit à l'abattoir et comme une brebis devant le tondeur il n'a pas ouvert la bouche (Is 53,7). Grâce à cette douceur, en effet, nous voyons combien inutile est la colère, de même que la menace, nous consentons alors à souffrir et nous ne servons pas le Christ par routine. Grâce à elle, nous apprenons à connaître tout ce qui nous est demandé: pleurer nos péchés dans la soumission et le silence, et endurer patiemment la souffrance quand elle se présente. Car le Christ a enduré ses tourments avec tant de douceur et de patience, non pour des péchés qu'il n'a pas commis, mais pour ceux d'autrui.

Dès lors, frères très chers, réfléchissez à toutes les vertus que le Christ nous a enseignées par sa vie exemplaire, qu'il nous recommande par ses exhortations et qu'il nous donne la force d'imiter avec l'aide de sa grâce.
Louis-Claude Fillion
Le divin Maître fit à travers les différentes parties de la Galilée, durant la première année de sa vie publique, trois voyages qui correspondent à trois missions importantes. La première de ces missions eut lieu dans les régions montagneuses, la seconde autour du lac, la troisième dans les villes. En cet endroit il est plus spécialement question de la première, bien que l’exposé de S. Matthieu puisse convenir à toutes. Elle embrasse les chap. 5-8 du premier Évangile. Nous trouverons le début de la seconde indiqué par S. Luc, 8, 1- 3, et celui de la troisième dans S. Matthieu, 9, 35 et ss.; Cf. notre Harmonie évangélique à la fin de l’Introduction générale. - Toute la Galilée. Il est temps de dire en peu de mots ce qu’était alors cette belle contrée que Jésus va parcourir en tous sens. Elle occupait l’ancien territoire des quatre tribus d’Aser, de Nephtali, de Zabulon et d’Issachar ; c’était donc la province la plus septentrionale de la Palestine. Ses limites se confondaient au N. avec celles du pays juif ; elles étaient formées à l’E. par le Jourdain, le lac Mérom et le lac de Tibériade, au S. par le Carmel et l’extrémité méridionale de la plaine d’Esdrelon, à l’O. par la Méditerranée et la Phénicie. C’était, du temps de Jésus-Christ, une riche région, très-peuplée, bien cultivée, parsemée de villes et de bourgades qu’habitait une population vigoureuse et indépendante. Son nom dérive, comme nous l’avons vu, Cf. le v. 15 et Is. 9, 1, de l’hébreu Galil, et signifie cercle, district. A l’époque dont nous parlons, elle se partageait en Galilée inférieure et en Galilée supérieure. La première embrassait la vaste plaine d’Esdrelon avec les premières ramifications des montagnes situées au N. de cette plaine et à l’E. jusqu’au Jourdain ; la seconde comprenait tout le Nord du pays, à partir d’une ligne droite qu’on tirerait entre Ptolémaïs et la partie supérieure du lac de Tibériade. C’est un plateau assez élevé, aux ondulations nombreuses, planté de magnifiques bois de chêne. Malgré tous ses malheurs, la Galilée a conservé, plus que toutes les autres zones de la Terre Sainte, des traces assez nombreuses de son ancienne splendeur, en particulier sous le double rapport de la population et de la fertilité. - Enseignant dans leurs synagogues. Le pronom « leurs » ne retombe directement sur aucun des mots qui précèdent ; il désigne les habitants de la province qui vient d’être mentionnée. Quoique peu correcte sous le rapport grammatical, la phrase est néanmoins facile à comprendre. - La synagogue est un local célèbre soit au point de vue du culte juif en général qui lui a conféré un si grand rôle, soit relativement à la vie de Notre-Seigneur puisqu’elle a servi de théâtre à plusieurs de ses miracles et de ses discours. Son nom hébreu était, Beth-Hakkenéceth, maison de réunion. Il est certain que l’existence des synagogues remonte à une haute antiquité ; cependant il serait difficile de fixer au juste l’époque où elles prirent naissance. Elles exercèrent la plus heureuse influence sur le maintien de la religion juive pendant et après l’exil. Au temps de Jésus-Christ, chaque ville ou village de la Palestine en possédait au moins une ; à Jérusalem, on en comptait jusqu’à 450 au dire des Rabbins. C’étaient des édifices aussi richement construits que le permettaient les ressources de la population. On tâchait de les bâtir sur un emplacement élevé, dans la ville ou du moins tout auprès ; elles étaient orientées de telle sorte qu’en entrant et qu’en priant les fidèles regardassent dans la direction de Jérusalem. On les consacrait par des prières spéciales, comme nos églises. L’arrangement intérieur était, « mutatis mutandis », celui du tabernacle, c’est-à-dire qu’au fond, du côté de Jérusalem, se trouvaient une lampe à plusieurs branches qu’on allumait aux grands jours et l’arche qui contenait le livre de la Loi ; vers le milieu de la salle, une plate-forme élevée sur laquelle était dressée le pupitre du lecteur. L’assistance avait sa place à l’entrée, les hommes d’un côté, les femmes de l’autre, séparés par une cloison haute de cinq ou six pieds. Le reste de l’ameublement consistait en troncs pour les aumônes, en cadres destinés à recevoir les affiches, et en placards où l’on déposait les trompettes sacrées et divers autres objets. On se réunissait dans les synagogues aux jours saints et aux heures saintes. Les jours saints étaient, indépendamment des solennités spéciales, le second ou lundi, le cinquième ou jeudi et le septième ou samedi ; les heures saintes, la troisième, « schaharith », 9 heures du matin, la sixième, « mincha » ou midi, et la troisième, « arabith », 3 heures du soir. Mais la plupart de ces réunions étaient facultatives ; la fréquentation des synagogues ne devenait obligatoire qu’aux jours de fête et de sabbat. Quant au culte qui s’y pratiquait, il reproduisait en petit, sauf les sacrifices, celui que les prêtres célébraient dans le temple ; il se composait de prières, de lectures extraites de la Bible, de prédications et de cérémonies qui variaient suivant les fêtes. Les coreligionnaires étrangers, quand c’étaient des personnes honorables, étaient fréquemment invités par le président à adresser quelques paroles d’édification à l’assemblée ; Jésus profitait volontiers de cette occasion pour annoncer ce que S. Matthieu appelle ici la bonne nouvelle du royaume. - Nous avons expliqué dans l’Introduction générale, ch. 1, l’origine et la signification du mot Évangile. - Et guérissant toute maladie... Prêcher et guérir, tels étaient les deux grands actes de Jésus missionnaire ; il se montrait ainsi le médecin tout à a fois des âmes et des corps. Les miracles disposaient les cœurs à bien recevoir la prédication, dont ils attestaient la vérité ; la divine semence de la prédication jetée partout sur les consciences empêchait les prodiges de ne produire qu’un effet superficiel et transitoire. Ces deux œuvres résument toute la vie publique du Sauveur, en même temps qu’elles expliquent le mot bien connu de S. Pierre : « Là où il passait, il faisait le bien », Act. 10, 38.
Fulcran Vigouroux
Les synagogues étaient des lieux d’assemblée de religion pour les Juifs ; ils s’y réjouissaient les jours de sabbat et les jours de fête pour prier, lire et entendre la parole de Dieu, et pour y exercer les autres pratiques de leur loi. ― Du royaume ; c’est-à-dire du royaume de Dieu.