Matthieu 5, 20
Je vous le dis en effet : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux.
Je vous le dis en effet : Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux.
659. MAIS JE VOUS DIS : «SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS [QUE CELLE DES SCRIBES ET DES PHARISIENS].» Plus haut, le Seigneur a montré que son intention n’était pas d’abolir la loi mais de l’accomplir. Ici il commence donc à l’accomplir.
660. Dans la loi il y avait quatre choses : des préceptes moraux, des prescriptions légales, des symboles, et des promesses. Le Seigneur accomplit en paroles trois de ces choses : la morale, les promesses et les dispositions légales, c’est-à-dire qu’il enseigne à les accomplir ; quant aux symboles, il les a accomplis en actes dans sa Passion. C’est pourquoi cette partie se divise en trois : premièrement, il accomplit la loi quant aux préceptes moraux ; deuxièmement quant aux promesses ; troisièmement quant aux prescriptions légales.
661. Les préceptes moraux sont de deux espèces : des interdictions et des permissions. Premièrement, il accomplit les premiers ; deuxièmement, les seconds, en cet endroit : IL A ÉTÉ DIT : [QUI RÉPUDIERA, etc.], Mt 5, 31.
662. À propos du premier point, il fait deux choses : premièrement, il interdit l’homicide ; deuxièmement, l’adultère, en cet endroit : VOUS AVEZ ENTENDU [QU’IL A ÉTÉ DIT] : «TU NE FERAS PAS D’ADULTÈRE» [5, 27].
663. À propos du premier point, il fait deux choses : d’abord il présente la nécessité ; deuxièmement l’accomplissement, en cet endroit : VOUS AVEZ ENTENDU.
664. Il dit donc : JE VOUS DIS [ : «SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS].» Notez que JUSTICE est pris dans deux sens : parfois elle est une vertu particulière, une des quatre cardinales, et elle a une matière déterminée, c’est-à-dire des biens variables qui servent à l’usage de la vie ; ailleurs on l’appelle une vertu générale, qui est la vertu commune que le Philosophe appelle justice légale et qui concerne l’accomplissement de la loi. C’est l’acception qu’elle a ici.
665. PLUS QUE CELLE DES SCRIBES. Et il dit : DES SCRIBES ET DES PHARISIENS, car ceux-ci étaient supérieurs en justice légale parce qu’ils rajoutaient encore des observances. Pour indiquer l’excellence du Nouveau Testament, [le Seigneur] montre donc que celui-ci surpasse même leur justice. C’est pourquoi on dit qu’il est plus petit dans le royaume des cieux, c’est-à-dire que l’Église est plus grande que lui. Le sens est donc : SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS (c’est-à-dire n’est pas plus parfaite) QUE CELLE DES SCRIBES ET DES PHARISIENS, VOUS N’ENTREREZ PAS, etc.
666. Et il faut savoir que le statut de l’Evangile est intermédiaire entre le stade de la loi et [celui] de la gloire, et cela est évident, car en Ga 4, 3, l’Apôtre compare le stade de la loi à l’enfance et l’Evangile à l’âge adulte, et il dit [Ga 4, 3 4] : Tant que nous étions enfants [nous étions asservis aux éléments du monde, mais quand vint la plénitude du temps, Dieu envoya son Fils, etc.], et avant [Ga 3, 24] : La loi nous servit de pédagogue [jusqu’au Christ], et en 1 Co 13, 11 : Quand j’étais enfant, [je parlais en enfant, etc.]. Il y a donc un état intermédiaire, et cela est naturel, car nul ne peut parvenir à un but sans en dépasser un autre. En effet, nul ne peut arriver à la vieillesse sans passer par l’enfance. Ainsi le Seigneur dit qu’on ne peut parvenir au stade du royaume des cieux sans passer par, etc. De plus, la récompense est gagnée avec une plus grande peine, 2 Co 9, 6 : Qui sème chichement [moissonnera aussi chichement ; qui sème largement moissonnera aussi largement]. Or, dans la loi, il y avait des promesses temporelles et terrestres, Is 1, 19 : Si vous voulez bien [obéir, vous mangerez les produits du terroir], mais ici les promesses sont célestes. La justice doit donc abonder en nous parce que la récompense attendue est plus grande.
667. Une objection se pose à propos de ce que dit le Seigneur : SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS, etc. La justice de la loi consiste à accomplir le décalogue. Or, qui accomplit les préceptes du décalogue aura la vie éternelle, Mt 19, 17 : Si tu veux entrer dans la vie, [observe les commandements]. Première solution : on dit généralement que ceux qui observent le décalogue n’ont jamais pu entrer, sinon par la foi et par la rédemption du sang du Christ, Ga 2, 21 : Car si la justice vient de la loi, [c’est donc que le Christ est mort pour rien]. Et c’est pourquoi il faut dire que ceci : Si tu veux entrer dans la vie, [observe les commandements], est à comprendre en supposant la foi. Or, les scribes et les pharisiens n’avaient pas la foi, Rm 9, 31[ 32] : Tandis qu’Israël qui poursuivait la loi de justice n’a pas atteint la loi. Pourquoi ? Parce qu’[au lieu de recourir à la foi, ils comptaient sur les œuvres]. Et cette solution est assez bonne.
668. Une autre [solution est donnée par] Augustin : il dit que tous ces accomplissements que le Christ fait sont tous contenus dans l’ancienne loi, parce que là aussi la colère est interdite, Lv 19, 17 :Tu n’auras pas dans ton cœur de haine pour ton frère. Qu’est-ce que le Seigneur a donc ajouté ? Il faut dire qu’il ajoute quant à la mauvaise compréhension des scribes et des pharisiens, qui croyaient que dans le précepte : Tu ne tueras pas, n’étaient interdits que les actes d’homicide, exception faite de ceux [causés] par la peur. Le Seigneur a donc expliqué cela, et c’est pourquoi il ne dit pas simplement : « Si votre justice n’abonde pas plus que la loi », mais SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS QUE CELLE DES PHARISIENS.
669. Encore une autre solution d’Augustin : le Christ avait dit : QUI FERA ET ENSEIGNERA..., et QUI VIOLERA... Or, les scribes et les pharisiens ne font pas et enseignent, Mt 23, 3 : Car ils disent [et ne font pas]. SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS, etc. signifie donc : «Ce que vous dites, faites-le aussi.»
670. Mais il reste une autre question, car le Seigneur a dit : DONC QUI VIOLERA… SERA APPELÉ LE PLUS PETIT DANS LE ROYAUME DES CIEUX, et qui ne surpasse pas n’entrera pas. Donc qui viole y sera.
671. Chrysostome donne cette solution : être dans le royaume, c’est autre chose que d’y entrer, car, à proprement parler, ceux-là entrent qui ont part à la propriété du royaume, mais ceux qui y sont, sont ceux qui s’arrêtent à un stade quelconque. Ainsi, même de ceux qui sont détenus en prison, on peut dire qu’ils sont dans le royaume. Il en est de même des cieux, car ceux qui sont condamnés à une peine sont dans le royaume, mais ils ne participent pas au règne.
672. Augustin explique autrement : il dit que nous pouvons comprendre par là que le royaume des cieux est de deux sortes : un où n’entrent que ceux qui ont la justice, et un autre où entrent ceux qui la violent, et c’est l’Église présente.
660. Dans la loi il y avait quatre choses : des préceptes moraux, des prescriptions légales, des symboles, et des promesses. Le Seigneur accomplit en paroles trois de ces choses : la morale, les promesses et les dispositions légales, c’est-à-dire qu’il enseigne à les accomplir ; quant aux symboles, il les a accomplis en actes dans sa Passion. C’est pourquoi cette partie se divise en trois : premièrement, il accomplit la loi quant aux préceptes moraux ; deuxièmement quant aux promesses ; troisièmement quant aux prescriptions légales.
661. Les préceptes moraux sont de deux espèces : des interdictions et des permissions. Premièrement, il accomplit les premiers ; deuxièmement, les seconds, en cet endroit : IL A ÉTÉ DIT : [QUI RÉPUDIERA, etc.], Mt 5, 31.
662. À propos du premier point, il fait deux choses : premièrement, il interdit l’homicide ; deuxièmement, l’adultère, en cet endroit : VOUS AVEZ ENTENDU [QU’IL A ÉTÉ DIT] : «TU NE FERAS PAS D’ADULTÈRE» [5, 27].
663. À propos du premier point, il fait deux choses : d’abord il présente la nécessité ; deuxièmement l’accomplissement, en cet endroit : VOUS AVEZ ENTENDU.
664. Il dit donc : JE VOUS DIS [ : «SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS].» Notez que JUSTICE est pris dans deux sens : parfois elle est une vertu particulière, une des quatre cardinales, et elle a une matière déterminée, c’est-à-dire des biens variables qui servent à l’usage de la vie ; ailleurs on l’appelle une vertu générale, qui est la vertu commune que le Philosophe appelle justice légale et qui concerne l’accomplissement de la loi. C’est l’acception qu’elle a ici.
665. PLUS QUE CELLE DES SCRIBES. Et il dit : DES SCRIBES ET DES PHARISIENS, car ceux-ci étaient supérieurs en justice légale parce qu’ils rajoutaient encore des observances. Pour indiquer l’excellence du Nouveau Testament, [le Seigneur] montre donc que celui-ci surpasse même leur justice. C’est pourquoi on dit qu’il est plus petit dans le royaume des cieux, c’est-à-dire que l’Église est plus grande que lui. Le sens est donc : SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS (c’est-à-dire n’est pas plus parfaite) QUE CELLE DES SCRIBES ET DES PHARISIENS, VOUS N’ENTREREZ PAS, etc.
666. Et il faut savoir que le statut de l’Evangile est intermédiaire entre le stade de la loi et [celui] de la gloire, et cela est évident, car en Ga 4, 3, l’Apôtre compare le stade de la loi à l’enfance et l’Evangile à l’âge adulte, et il dit [Ga 4, 3 4] : Tant que nous étions enfants [nous étions asservis aux éléments du monde, mais quand vint la plénitude du temps, Dieu envoya son Fils, etc.], et avant [Ga 3, 24] : La loi nous servit de pédagogue [jusqu’au Christ], et en 1 Co 13, 11 : Quand j’étais enfant, [je parlais en enfant, etc.]. Il y a donc un état intermédiaire, et cela est naturel, car nul ne peut parvenir à un but sans en dépasser un autre. En effet, nul ne peut arriver à la vieillesse sans passer par l’enfance. Ainsi le Seigneur dit qu’on ne peut parvenir au stade du royaume des cieux sans passer par, etc. De plus, la récompense est gagnée avec une plus grande peine, 2 Co 9, 6 : Qui sème chichement [moissonnera aussi chichement ; qui sème largement moissonnera aussi largement]. Or, dans la loi, il y avait des promesses temporelles et terrestres, Is 1, 19 : Si vous voulez bien [obéir, vous mangerez les produits du terroir], mais ici les promesses sont célestes. La justice doit donc abonder en nous parce que la récompense attendue est plus grande.
667. Une objection se pose à propos de ce que dit le Seigneur : SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS, etc. La justice de la loi consiste à accomplir le décalogue. Or, qui accomplit les préceptes du décalogue aura la vie éternelle, Mt 19, 17 : Si tu veux entrer dans la vie, [observe les commandements]. Première solution : on dit généralement que ceux qui observent le décalogue n’ont jamais pu entrer, sinon par la foi et par la rédemption du sang du Christ, Ga 2, 21 : Car si la justice vient de la loi, [c’est donc que le Christ est mort pour rien]. Et c’est pourquoi il faut dire que ceci : Si tu veux entrer dans la vie, [observe les commandements], est à comprendre en supposant la foi. Or, les scribes et les pharisiens n’avaient pas la foi, Rm 9, 31[ 32] : Tandis qu’Israël qui poursuivait la loi de justice n’a pas atteint la loi. Pourquoi ? Parce qu’[au lieu de recourir à la foi, ils comptaient sur les œuvres]. Et cette solution est assez bonne.
668. Une autre [solution est donnée par] Augustin : il dit que tous ces accomplissements que le Christ fait sont tous contenus dans l’ancienne loi, parce que là aussi la colère est interdite, Lv 19, 17 :Tu n’auras pas dans ton cœur de haine pour ton frère. Qu’est-ce que le Seigneur a donc ajouté ? Il faut dire qu’il ajoute quant à la mauvaise compréhension des scribes et des pharisiens, qui croyaient que dans le précepte : Tu ne tueras pas, n’étaient interdits que les actes d’homicide, exception faite de ceux [causés] par la peur. Le Seigneur a donc expliqué cela, et c’est pourquoi il ne dit pas simplement : « Si votre justice n’abonde pas plus que la loi », mais SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS QUE CELLE DES PHARISIENS.
669. Encore une autre solution d’Augustin : le Christ avait dit : QUI FERA ET ENSEIGNERA..., et QUI VIOLERA... Or, les scribes et les pharisiens ne font pas et enseignent, Mt 23, 3 : Car ils disent [et ne font pas]. SI VOTRE JUSTICE N’ABONDE PAS PLUS, etc. signifie donc : «Ce que vous dites, faites-le aussi.»
670. Mais il reste une autre question, car le Seigneur a dit : DONC QUI VIOLERA… SERA APPELÉ LE PLUS PETIT DANS LE ROYAUME DES CIEUX, et qui ne surpasse pas n’entrera pas. Donc qui viole y sera.
671. Chrysostome donne cette solution : être dans le royaume, c’est autre chose que d’y entrer, car, à proprement parler, ceux-là entrent qui ont part à la propriété du royaume, mais ceux qui y sont, sont ceux qui s’arrêtent à un stade quelconque. Ainsi, même de ceux qui sont détenus en prison, on peut dire qu’ils sont dans le royaume. Il en est de même des cieux, car ceux qui sont condamnés à une peine sont dans le royaume, mais ils ne participent pas au règne.
672. Augustin explique autrement : il dit que nous pouvons comprendre par là que le royaume des cieux est de deux sortes : un où n’entrent que ceux qui ont la justice, et un autre où entrent ceux qui la violent, et c’est l’Église présente.
Ce verset répète une dernière
fois le principe que nous avons entendu déjà à trois reprises ; il ménage en outre une transition entre le
principe et les exemples au moyen desquels le divin Maître continuera de l’appuyer. - Abondante est une
traduction un peu trop littérale du grec, mieux vaudrait « excellente, éminente ». - Votre justice : votre
conduite morale. - Que celle des scribes... : Les Scribes, dont nous avons déjà fait connaître les fonctions
(voir la note de 2, 4), n’étaient pas tous Pharisiens, Cf. 23, 9 ; il y avait néanmoins entre les uns et les autres,
sous le triple rapport de l’esprit, des mœurs et de l’hostilité contre Jésus, une si grande ressemblance, que les
évangélistes aiment à les associer dans leurs récits. Nous verrons bientôt, par de nombreux détails, que leur
« justice » ou leur vertu était en général purement extérieure et n’avait rien de foncier, de sérieux. Et pourtant
ils aimaient la Loi mosaïque, professaient pour elle une dévotion réelle : malheureusement leur culte à
outrance se bornait à la lettre, ce qui le rendait souvent très inefficace. Notre-Seigneur veut d’une part que
ses disciples imitent le soin rigoureux que ces hommes prenaient pour maintenir les moindres préceptes de
l’ancienne théocratie ; mais il leur annonce d’autre part qu’il les exclura impitoyablement de son royaume,
soit en ce monde soit dans l’autre, si leur vertu n’est pas plus sincère. - Vous n'entrerez pas... Il y a cette fois
exclusion proprement dite, parce qu’on manquera des conditions requises pour être un bon chrétien. - Autre
chose est un Pharisien ou un Scribe, autre chose un disciple de Jésus. Ainsi, nous devons être supérieurs aux
Pharisiens et en sainteté et en attachement à la Loi ; par conséquent, avec quelle ténacité ne devons -nous pas
conserver, en les perfectionnant, les moindres préceptes de l’ancienne législation ? Cette argumentation est
rigoureuse. Sans doute il y avait de bons Pharisiens et de bons Scribes, mais en petit nombre ; du reste
Notre-Seigneur ne s’arrête pas aux personnes, il veut parler surtout des idées qu’elles représentaient.
Jésus a repris les dix commandements, mais il a manifesté la force de l’Esprit à l’œuvre dans leur lettre. Il a prêché la " justice qui surpasse celle des scribes et des pharisiens " (Mt 5, 20) aussi bien que celle des païens (cf. Mt 5, 46-47). Il a déployé toutes les exigences des commandements. " Vous avez entendu qu’il a été dit aux ancêtres : Tu ne tueras pas ... Eh bien ! Moi je vous dis : quiconque se fâche contre son frère en répondra au tribunal " (Mt 5, 21-22).