Matthieu 5, 25
Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire pendant que tu es en chemin avec lui, pour éviter que ton adversaire ne te livre au juge, le juge au garde, et qu’on ne te jette en prison.
Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire pendant que tu es en chemin avec lui, pour éviter que ton adversaire ne te livre au juge, le juge au garde, et qu’on ne te jette en prison.
Le Seigneur ne veut pas qu'il y ait un seul instant de notre vie où ne nous professions un vif amour pour la paix. Il nous commande donc de nous réconcilier au plus tôt avec notre ennemi, tandis que nous sommes dans le chemin de la vie, afin de ne pas arriver au moment de la mort sans avoir fait la paix : « Accordez-vous promptement avec votre adversaire, nous dit-il, pendant que vous êtes en chemin avec lui, de peur que votre adversaire ne vous livre au juge. »
Ou bien votre adversaire vous livrera au juge, parce que cette haine secrète que vous faites peser continuellement sur lui, sera votre accusateur devant Dieu.
La charité couvre la multitude des péchés ; nous paierons donc jusqu'à la dernière obole si, à l'aide de cette divine charité, nous n'acquittons pas les dettes de nos péchés.
Le Seigneur nous presse de nous hâter pendant cette vie de rechercher l'amitié de nos ennemis, car il sait quel danger nous courons, si l'un d'eux vient à mourir avant que nous ayons fait la paix avec lui. Si la mort vous surprend et que vous paraissiez devant votre juge dans cet état d'inimitié, votre ennemi vous livrera au Christ et vous convaincra de crime devant son tribunal. Vous eût-il demandé d'abord comme une grâce de vous réconcilier, il ne laissera pas de vous livrer entre les mains du juge, car celui qui prie son ennemi de lui accorder la paix augmente sa culpabilité aux yeux de Dieu.
Ou bien encore ce ministre, c'est l'ange redoutable du châtiment, et c'est lui qui vous enverra dans le cachot de l'enfer signifié par ces paroles : « Et vous serez jeté en prison. »
Ou bien encore, si vous faites votre paix en ce monde, vous pourrez recevoir le pardon des plus grands crimes, mais si vous êtes une fois condamné et jeté en prison, vous serez puni, non-seulement pour vos fautes les plus graves, mais pour une seule parole oiseuse qui peut être signifiée par cette obole dont il est ici parlé.
Ou bien encore, par cette prison, on peut entendre les angoisses de ce monde auxquelles Dieu condamne ceux qui se livrent habituellement au péché.
On peut dire enfin qu'il est ici question des juges de la terre, du chemin qui conduit à leur tribunal et des prisons d'ici-bas, car Notre-Seigneur veut produire la persuasion dans ceux qui l'écoutent, non-seulement par les choses de l'éternité, mais aussi par celles du temps, qui sont devant nos yeux et de nature à nous impressionner davantage. C'est dans ce sens que saint Paul disait « Si vous avez mal fait, craignez le pouvoir, car ce n'est pas sans raison qu'il est armé du glaive. »
Dans le grec, au lieu du mot consentiens (qui est d'accord), qui se trouve dans les exemplaires latins, ou lit : '''''', bienveillant.
Comment d'ailleurs la chair serait-elle condamnée à la prison pour avoir été en désaccord avec l'âme, puisque l'âme et la chair seront punies du même supplice, et que la chair ne fait qu'obéir aux ordres de l'âme.
Cependant les antécédents démontrent avec évidence, ce nous semble, que le Seigneur veut nous parler ici de l'union produite par la charité fraternelle, puisqu'il est dit plus haut : « Allez vous réconcilier avec votre frère. »
Il en est cependant qui prétendent que le Sauveur nous ordonne de nous montrer bienveillant pour le démon, en ne l'exposant point aux nouveaux supplices que Dieu lui inflige pour nous, disent-ils, toutes les fois que nous consentons à ses funestes inspirations. Quelques autres avancent avec plus de réserve que chacun de nous, en renonçant au démon dans le baptême, contracte un engagement avec lui. Si nous sommes fidèles à cet engagement, nous sommes, avec notre adversaire, dans les termes voulus de la bienveillance et du bon accord, et nous n'avons pas à craindre d'être jetés dans la prison.
L'obole est une pièce de monnaie qui vaut environ deux liards, la plus petite espèce de monnaie, et ces paroles du Sauveur veulent dire : « Vous n'en sortirez pas que vous n'ayez expié vos fautes les plus légères. »
Examinons quel est cet adversaire que Dieu nous ordonne de traiter en ami : c'est ou le démon, ou l'homme, ou la chair, ou Dieu, ou son commandement. Quant au démon, je ne vois pas comment nous serions obligés de lui témoigner de la bienveillance ou du bon accord ; car la bienveillance suppose l'amitié, et personne n'oserait dire que nous devions rechercher celle du démon. Nous serait-il plus avantageux de faire la paix avec celui à qui nous avons renoncé et déclaré par là même une guerre éternelle ? Enfin, aucun accord n'est possible avec celui qui ne nous a plongés dans tous nos malheurs que par l'union qui existait entre nous et lui.
Je ne vois pas non plus comment admettre que nous serons livrés à notre juge par un homme, alors que ce juge est le Christ devant le tribunal duquel nous devons tous comparaître. Comment cet homme pourrait-il vous remettre entre les mains de votre juge, lui qui doit comparaître lui-même devant son tribunal ? En supposant même qu'un homme devienne l'adversaire de son frère en lui donnant la mort, il ne lui est plus possible de faire la paix avec lui dans le chemin, c'est-à-dire pendant cette vie, et cependant le repentir pourra guérir son âme. Je comprends beaucoup moins encore qu'on nous ordonne de nous mettre d'accord avec la chair, car ce sont surtout les pécheurs qui vivent en parfait accord avec elle. Ceux, au contraire, qui la réduisent en servitude, ne s'accordent pas avec la chair, mais la forcent de s'accorder avec eux.
Peut-être est-ce avec Dieu qu'il nous est ordonné de nous mettre d'accord, car le péché nous sépare de lui, et il devient notre adversaire en nous résistant, selon cette parole : Dieu résiste aux superbes (1 P 5 ; Jc 4, 6 ; Pv 3, 34). Tout homme donc qui, pendant cette vie, ne se sera pas réconcilié avec Dieu par la mort de son Fils, sera livré par lui au juge, c'est-à-dire au Fils à qui le Père a donné tout jugement. Mais comment peut-on dire avec quelque raison que l'homme se trouve dans le chemin avec Dieu, si ce n'est parce que Dieu est partout ? Éprouvons-nous quelque difficulté à dire que les impies sont avec Dieu, qui est partout, comme à dire que les aveugles sont avec la lumière qui les environne ? Il ne nous reste plus qu'à voir dans cet adversaire le commandement de Dieu, qui se montre contraire à ceux qui veulent pécher. Ce commandement nous a été donné pour nous diriger dans le chemin de la vie ; il ne faut point tarder à nous accorder avec lui, en le lisant, en l'écoutant avec attention, en lui donnant sur nous une souveraine autorité. Si nous comprenons en partie ce précepte, nous ne devons pas le haïr, parce qu'il est contraire à nos péchés, mais nous devons l'en aimer davantage, parce qu'il nous fait rentrer dans le devoir et prier Dieu de nous révéler ce qui lui reste d'obscur pour nous.
Ce juge, à mon avis, c'est le Christ, car le Père a donné tout jugement au Fils. (Jn 5, 23.) Le ministre, c'est l'ange de la justice de Dieu ; « Et les anges, dit l'Évangéliste, le servaient. » (Mt 4.) Nous croyons en effet qu'au jour du jugement les anges formeront son cortège. Voilà pourquoi il ajoute : « Et que le juge ne vous livre au ministre. »
La prison, ce sont les peines des ténèbres, et, dans la crainte que vous ne méprisiez ce supplice, il ajoute : Je vous le dis en vérité, vous ne sortirez point de là que vous n'ayez payé jusqu'à la dernière obole. »
Ou bien Notre-Seigneur emploie ces expressions pour nous marquer que rien ne reste impuni ; c'est ainsi que nous disons d'une chose exigée jusqu'à la rigueur, qu'on a été jusqu'à la lie. Ou bien cette dernière obole signifie peut-être les péchés de la terre, car la terre est la quatrième et la dernière partie des éléments de ce monde. Ces paroles : « Que vous n'ayez payé » signifient la peine éternelle, et l'expression jusqu'à ce que doit être prise dans le même sens que dans cette autre phrase : « Asseyez-vous à ma droite, jusqu'à ce que je réduise vos ennemis à vous servir de marchepied ; » car il est évident que son règne ne cessera pas lorsque ses ennemis lui seront soumis. « Vous n'en sortirez pas que vous n'ayez payé jusqu'à la dernière obole, » ce qui n'arrivera jamais, car on y paiera tout, jusqu'à la dernière obole, tant que dureront les peines éternelles dues aux péchés qui ont été commis sur la terre.
760. ACCORDE-TOI AVEC TON ADVERSAIRE. Plus haut, [le Seigneur] a interdit d’avoir de la colère, ou de la discorde avec ses frères ; ici, il déconseille d’avoir de la discorde avec un adversaire, quand il dit : ACCORDE-TOI (c’est-à-dire « sois bienveillant ou bon, d’après le sens du [terme employé dans le texte] grec [eunoôn] », comme dit Jérôme) AVEC TON ADVERSAIRE. Objection : l’adversaire, c’est le diable. C’est donc avec lui qu’il faut s’accorder. Réponse : [le Seigneur] parle de celui qui est avec nous en chemin, mais le diable n’est pas sur le chemin, il ne peut y être, il est éternellement hors du droit chemin. Donc, AVEC TON ADVERSAIRE, selon Chrysostome, c’est avec l’homme qui n’est pas d’accord avec nous, ou bien avec un ennemi au sens propre, Rm 12, 18 : S’il se peut, étant en paix avec tout le monde.
761. TANT QUE, c’est-à-dire aussi longtemps que, TU ES AVEC LUI EN CHEMIN, c’est-à-dire en situation de gagner, Jn 9, 4 : Vient le temps où on ne peut travailler. Ou bien notre adversaire est Dieu, comme dit Ex 23, 7 : Moi, le Seigneur, qui suis opposé à l’impie. Ou bien la parole divine, qui s’oppose à ceux qui veulent pécher, 2 Tm 3, 16 : Toute Écriture divinement inspirée est utile pour enseigner, pour réfuter. Ou bien le remords de conscience dont parle Ps 49, 21 : Je te dénonce et m’explique devant toi.
762. Et ainsi à nouveau cela s’explique de toutes ces façons. D’où ACCORDE-TOI AVEC TON ADVERSAIRE, c’est-à-dire Dieu et la parole divine (selon Augustin et Bède), avec lesquels il faut s’accorder dans l’espérance de ce qui est promis, dans la crainte du supplice, dans la mise en œuvre de ce qui est prescrit, dans l’éloignement de ce qui est interdit.
763. VITE, c’est-à-dire sans retard, Si 5, 8 : Ne tarde pas à te tourner vers le Seigneur. TANT QUE TU ES AVEC LUI, celui avec qui tu marches tout droit, EN CHEMIN, celui du Christ, ou de la pénitence, ou du monde, Ps 118[119], 32 : J’ai couru sur le chemin de tes commandements, car tu as dilaté mon cœur.
DE PEUR QUE PAR HASARD IL TE LIVRE. Selon Augustin, DE PEUR QUE PAR HASARD, d’aventure, ce soit la cause que tu sois livré. [Le Seigneur] dit PAR HASARD, selon la Glose, de peur que l’occasion de te repentir [te] soit ôtée, car si un adversaire était mort avant de s’accorder ou d’être bien disposé, il semble qu’il serait damné, si on disait simplement : DE PEUR QUE L’ADVERSAIRE – la parole divine, ou Dieu, ou le remords de conscience – TE LIVRE AU JUGE. La Glose [dit] : «Aux mains du Christ», Jn 5, 22 : Il a donné tout jugement au Fils.
QUE LE JUGE - c’est-à-dire le Christ, Jr 29, 23 : Moi je suis le juge et le témoin - TE LIVRE AU GARDE. La Glose [dit] : «À l’ange qui ramasse les mauvaises herbes pour les emporter » (Mt, chapitre 13,[30]). Ps 103, 4 : Qui a fait des vents ses anges. Ou bien AU GARDE, c’est-à-dire à l’exécuteur du diable, Is 14, 4 : Comment a fini l’exacteur ? ET QU’ON TE METTE EN PRISON, c’est-à-dire dans les abîmes de l’enfer, Is 24, 22 : Ils seront enfermés en prison ; Ap 20, 3 : Il l’a jeté dans l’abîme et il l’a enfermé.
761. TANT QUE, c’est-à-dire aussi longtemps que, TU ES AVEC LUI EN CHEMIN, c’est-à-dire en situation de gagner, Jn 9, 4 : Vient le temps où on ne peut travailler. Ou bien notre adversaire est Dieu, comme dit Ex 23, 7 : Moi, le Seigneur, qui suis opposé à l’impie. Ou bien la parole divine, qui s’oppose à ceux qui veulent pécher, 2 Tm 3, 16 : Toute Écriture divinement inspirée est utile pour enseigner, pour réfuter. Ou bien le remords de conscience dont parle Ps 49, 21 : Je te dénonce et m’explique devant toi.
762. Et ainsi à nouveau cela s’explique de toutes ces façons. D’où ACCORDE-TOI AVEC TON ADVERSAIRE, c’est-à-dire Dieu et la parole divine (selon Augustin et Bède), avec lesquels il faut s’accorder dans l’espérance de ce qui est promis, dans la crainte du supplice, dans la mise en œuvre de ce qui est prescrit, dans l’éloignement de ce qui est interdit.
763. VITE, c’est-à-dire sans retard, Si 5, 8 : Ne tarde pas à te tourner vers le Seigneur. TANT QUE TU ES AVEC LUI, celui avec qui tu marches tout droit, EN CHEMIN, celui du Christ, ou de la pénitence, ou du monde, Ps 118[119], 32 : J’ai couru sur le chemin de tes commandements, car tu as dilaté mon cœur.
DE PEUR QUE PAR HASARD IL TE LIVRE. Selon Augustin, DE PEUR QUE PAR HASARD, d’aventure, ce soit la cause que tu sois livré. [Le Seigneur] dit PAR HASARD, selon la Glose, de peur que l’occasion de te repentir [te] soit ôtée, car si un adversaire était mort avant de s’accorder ou d’être bien disposé, il semble qu’il serait damné, si on disait simplement : DE PEUR QUE L’ADVERSAIRE – la parole divine, ou Dieu, ou le remords de conscience – TE LIVRE AU JUGE. La Glose [dit] : «Aux mains du Christ», Jn 5, 22 : Il a donné tout jugement au Fils.
QUE LE JUGE - c’est-à-dire le Christ, Jr 29, 23 : Moi je suis le juge et le témoin - TE LIVRE AU GARDE. La Glose [dit] : «À l’ange qui ramasse les mauvaises herbes pour les emporter » (Mt, chapitre 13,[30]). Ps 103, 4 : Qui a fait des vents ses anges. Ou bien AU GARDE, c’est-à-dire à l’exécuteur du diable, Is 14, 4 : Comment a fini l’exacteur ? ET QU’ON TE METTE EN PRISON, c’est-à-dire dans les abîmes de l’enfer, Is 24, 22 : Ils seront enfermés en prison ; Ap 20, 3 : Il l’a jeté dans l’abîme et il l’a enfermé.