Matthieu 5, 38
Vous avez appris qu’il a été dit : Œil pour œil, et dent pour dent.
Vous avez appris qu’il a été dit : Œil pour œil, et dent pour dent.
825. VOUS AVEZ ENTENDU QU’IL A ÉTÉ DIT : ŒIL POUR ŒIL. C’est la seconde partie depuis cet endroit : MAIS MOI JE VOUS DIS, etc., et [le Seigneur] y exhorte à la perfection de l’accomplissement, en ajoutant des conseils. Premièrement, il présente des conseils d’ordre judiciaire ; deuxièmement, d’ordre moral, en cet endroit : VOUS AVEZ ENTENDU QU’IL A ÉTÉ DIT : «TU AIMERAS TON PROCHAIN» [Mt 5, 43].
826. Le premier point [se divise] en deux : d’abord, la justice de l’ancienne loi ; ensuite la perfection de la nouvelle loi, qui consiste en deux choses : endurer jusqu’au bout le mal qu’on nous fait ; faire le bien, en cet endroit : À QUI TE DEMANDE, DONNE [Mt 5, 42].
827. Endurer le mal qu’on nous fait de deux façons : dans notre corps ou dans nos biens, en cet endroit : SI QUELQU’UN VEUT TE FAIRE UN PROCÈS [Mt 5, 40]. Bien agir, en cet endroit : SI QUELQU’UN TE RÉQUISITIONNE POUR FAIRE MILLE PAS [Mt 5, 41].
828. Il nous exhorte à deux degrés différents à supporter le mal reçu dans notre corps : premier degré, ne pas désirer se venger ; deuxième degré, être prêt à en supporter davantage, en cet endroit : SI QUELQU’UN TE FRAPPE SUR LA JOUE DROITE [Mt 5, 39].
829. [Le Seigneur] dit donc : VOUS AVEZ ENTENDU QU’IL A ÉTÉ DIT. Il ne dit pas à qui, pour indiquer que ceux-là avaient le cœur dur : ŒIL POUR ŒIL, DENT POUR DENT, en quoi la loi du talion avait été établie pour le tort subi, comme dit Augustin, Ex 21, 24 et Dt 19, 21.
830. Question : pourquoi Moïse a-t-il concédé la loi du talion ? Réponse : Moïse les a vus se lancer sans réfléchir dans des injures et des vengeances, et c’est pourquoi, comme il ne pouvait les ramener autrement, il voulut tempérer la vengeance pour éviter qu’ils n’exercent des vengeances démesurées par rapport aux torts subis, et pour qu’ils rendent, dans la plupart des cas, le talion, c’est-à-dire une vengeance équivalente au tort subi. Il y a aussi une glose d’Augustin sur ce sujet : «La loi constitue la mesure de la vengeance.»
831. Objection : Lv 19, 18 : Ne cherche pas la vengeance, ne te souviens pas de l’injure de tes concitoyens. Réponse : la loi du talion était dans un commandement adressé au juge, pour qu’il l’exerce avec la passion de la justice, et non avec la passion de la vengeance, et pour empêcher les méchants d’agir. C’est ainsi qu’Augustin l’entend. Mais, comme il était permis de faire un tort égal, les Juifs croyaient qu’on pouvait se venger, et c’est pourquoi la vengeance est interdite dans le Lévitique.
Encore Augustin, au même endroit : «C’est la justice des injustes, car une vengeance établie par la loi n’est pas injuste.» Donc la vengeance était licite. Réponse : la vengeance était permise au juge lui-même par amour de la justice, non par amour de la vengeance. La Glose se comprend donc ainsi : la juste vengeance des injustes, c’est-à-dire de ceux qui exigent injustement une vengeance.
826. Le premier point [se divise] en deux : d’abord, la justice de l’ancienne loi ; ensuite la perfection de la nouvelle loi, qui consiste en deux choses : endurer jusqu’au bout le mal qu’on nous fait ; faire le bien, en cet endroit : À QUI TE DEMANDE, DONNE [Mt 5, 42].
827. Endurer le mal qu’on nous fait de deux façons : dans notre corps ou dans nos biens, en cet endroit : SI QUELQU’UN VEUT TE FAIRE UN PROCÈS [Mt 5, 40]. Bien agir, en cet endroit : SI QUELQU’UN TE RÉQUISITIONNE POUR FAIRE MILLE PAS [Mt 5, 41].
828. Il nous exhorte à deux degrés différents à supporter le mal reçu dans notre corps : premier degré, ne pas désirer se venger ; deuxième degré, être prêt à en supporter davantage, en cet endroit : SI QUELQU’UN TE FRAPPE SUR LA JOUE DROITE [Mt 5, 39].
829. [Le Seigneur] dit donc : VOUS AVEZ ENTENDU QU’IL A ÉTÉ DIT. Il ne dit pas à qui, pour indiquer que ceux-là avaient le cœur dur : ŒIL POUR ŒIL, DENT POUR DENT, en quoi la loi du talion avait été établie pour le tort subi, comme dit Augustin, Ex 21, 24 et Dt 19, 21.
830. Question : pourquoi Moïse a-t-il concédé la loi du talion ? Réponse : Moïse les a vus se lancer sans réfléchir dans des injures et des vengeances, et c’est pourquoi, comme il ne pouvait les ramener autrement, il voulut tempérer la vengeance pour éviter qu’ils n’exercent des vengeances démesurées par rapport aux torts subis, et pour qu’ils rendent, dans la plupart des cas, le talion, c’est-à-dire une vengeance équivalente au tort subi. Il y a aussi une glose d’Augustin sur ce sujet : «La loi constitue la mesure de la vengeance.»
831. Objection : Lv 19, 18 : Ne cherche pas la vengeance, ne te souviens pas de l’injure de tes concitoyens. Réponse : la loi du talion était dans un commandement adressé au juge, pour qu’il l’exerce avec la passion de la justice, et non avec la passion de la vengeance, et pour empêcher les méchants d’agir. C’est ainsi qu’Augustin l’entend. Mais, comme il était permis de faire un tort égal, les Juifs croyaient qu’on pouvait se venger, et c’est pourquoi la vengeance est interdite dans le Lévitique.
Encore Augustin, au même endroit : «C’est la justice des injustes, car une vengeance établie par la loi n’est pas injuste.» Donc la vengeance était licite. Réponse : la vengeance était permise au juge lui-même par amour de la justice, non par amour de la vengeance. La Glose se comprend donc ainsi : la juste vengeance des injustes, c’est-à-dire de ceux qui exigent injustement une vengeance.
C’est
toujours la même méthode : Jésus cite le texte de la Loi en faisant allusion au sens étroit qu’on lui donnait
alors, puis il l’interprète selon l’esprit du Christianisme. - Œil pour oeil... (sous-entendu « rends » ou
« exiges »). Il s’agit dans ce cinquième exemple, de ce qu’on appelait le « droit du talion » ou plus
simplement le talion. Moïse en avait parlé à différentes reprises ; il était même entré à ce sujet dans des
détails nombreux et précis : Cf. Ex. 21, 23-25 ; Lev. 24, 19 et 20 ; Deut. 19, 21. Notre -Seigneur se borne à
mentionner la substance de la Loi. Il s’en faut beaucoup que ce droit du talion soit une institution
exclusivement juive ; on le trouve au contraire à la base de tous les codes criminels. Les Douze Tables
romaines le contiennent en propres termes : « Si on a estropié un autre et qu'on n'a pas conclu d'accord à
l'amiable avec la victime, que la peine du Talion soit appliquée ». Malgré l’air de cruauté qu’il porte extérieurement, c’était en réalité une règle pleine de sagesse, qui proportionnait le châtiment au méfait, en
établissant ce principe d’une justice inattaquable qu’il y aurait parité entre l’offense et la réparation. Du reste,
il n’était nullement abandonné, dans la pratique, à l’initiative privée ; les juges seuls avaient le pouvoir d’en
faire l’application, et ils ne prenaient pas toujours à la lettre les paroles du décret : le plus souvent ils se
contentaient d’infliger une pénalité regardée d’après l’opinion générale comme équivalente au dommage, par
exemple, telle amende, tel emprisonnement, etc.