Matthieu 8, 24

Et voici que la mer devint tellement agitée que la barque était recouverte par les vagues. Mais lui dormait.

Et voici que la mer devint tellement agitée que la barque était recouverte par les vagues. Mais lui dormait.
Saint Thomas d'Aquin
1073. Ensuite, le miracle est ajouté. Premièrement, le danger imminent est présenté [8, 24] ; deuxièmement, l’interpellation par les disciples, en cet endroit : ET ILS S’APPROCHÈRENT [8, 25] ; troisièmement, l’exaucement qui leur [est accordé], en cet endroit : ET JÉSUS LEUR DIT [8, 26].

1074. Le danger est signalé par la tempête et par le sommeil du Christ : ET VOICI QU’UNE GRANDE AGITATION SE PRODUISIT. Comme le disent les saints, la tempête ne fut pas soulevée par la bourrasque de l’air, mais elle était apparue sur un ordre de Dieu. Et ceci se produisit pour plusieurs raisons. Premièrement, afin que les disciples, qui avaient été particulièrement aimés et appelés, apprécient l’humilité et ne s’enorgueillissent pas ; et cela signifiait le danger à venir, qui devait se présenter au moment de la passion et par la suite, comme le dit l’apôtre Paul, 2 Co 1, 8 : Nous sommes écrasés au-delà de nos forces, de sorte que la vie même nous rebute. De même, [cela se produisit] pour une autre cause : afin que [les disciples] sachent vivre au milieu des dangers et l’emporter, comme on le lit en Rm 8, 37 : Dans tout cela, nous l’emportons à cause de Celui qui nous a aimés. De même, Chrysostome explique que ceux-là devaient prêcher ce qu’ils avaient vu chez le Christ. Ainsi, afin qu’ils connaissent mieux les miracles et soient plus assurés, le Seigneur a voulu qu’ils en fassent l’expérience. Ps 65[66], 16 : Venez, et je vous raconterai les œuvres du Seigneur. En effet, ils pouvaient ainsi garder un souvenir plus vif de ce qui leur était arrivé.

1075. LUI CEPENDANT DORMAIT. Et cela, afin de montrer qu’il était vraiment homme. En effet, [Jésus] s’est comporté en tout de manière à ce que, là où il voulait montrer sa divinité, il montrât toujours quelque chose de son humanité. Il dormait, parce qu’il a été reconnu à son aspect comme un homme, Ph 2, 7. En effet, selon la divinité, il ne dormait pas. Ps 120[121], 4 : Il ne dort pas et il ne dormira pas Celui qui garde Israël. De même, il dormait afin que [les disciples] soient partagés entre la crainte et l’espoir. De même, afin de montrer son caractère singulier, car, au milieu d’une telle tempête, il restait sans inquiétude. Pr 8, 28 : Quand il condensait les sources d’eau, quand il fixait une limite à la mer et imposait une loi aux eaux.
Louis-Claude Fillion
Une grande tempête. Description très belle dans sa simplicité et rapide comme l’orage qui éclata sur le lac. - Dans le texte latin, « Motus magnus » est un terme technique pour désigner les tremblements de terre ; mais on l’emploie souvent aussi dans la Bible et dans les ouvrages classiques pour représenter toute sorte d’agitations violentes sur terre et sur mer. Au départ rien ne faisait pressentir l’orage ; mais on sait que toutes les mers intérieures, entourées de montagnes, sont sujettes à des coups de vent très soudains qui y déterminent des ouragans terribles. Cela est particulièrement vrai du lac de Tibériade, comme nous l’apprennent les voyageurs anciens et modernes ; Cf. Robinson, Palaestina, 3, 571 ; K. Ritter, Erdkunde, 15, 308. Outre la raison commune que nous venons d’énoncer, il y a encore le motif particulier de la situation extraordinaire de cette mer : les vents s’engouffrent avec furie dans la profonde cavité qui la contient et semblent parfois vouloir tout renverser. Il n’est donc pas nécessaire d’admettre que cette tempête fut surnaturelle dans son principe (« la tempête ne vient pas des conditions atmosphériques, mais de la providence divine », S. Thom. Aq. ; Cf. Glossa ord., Jansenius, Sylveira) ; il suffit de dire qu’elle fut providentielle. - La barque était couverte par les flots... ; S. Marc, 4, 37, est encore plus explicite : « Les flots pénétraient dans le navire, menaçant de le remplir d’eau » ; on courut donc bientôt un danger réel d’être englouti sous les eaux. Cf. Luc, 8, 23. - Cependant, que devenait Jésus ? Contraste étonnant ! Lui, il dormait. Fatigué des travaux du jour qui avaient été nombreux et pénibles, Cf. Marc. 4, 1-35, il s’était couché au fond de l’embarcation et dormait paisiblement. Mais il se proposait aussi de donner par là une utile leçon à ses disciples : « Il dort pour rendre conscients ceux qui sont éveillés. Car si cela était arrivé quand il était éveillé, ou ils n’auraient pas craint, ou ils n’auraient rien demandé, ou ils auraient pensé qu’il ne pourrait rien faire », S. Jean Chrysost. Hom. 28 in Matth.
Fulcran Vigouroux
« Il n’y a de tempête sur la mer de Tibériade que par les vents d’ouest. Venant de la côte de Capharnaüm, ils devaient chasser la barque avec violence et l’empêcher d’aborder. » (J.-H. MICHON.)