Matthieu 9, 17

Et on ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres ; autrement, les outres éclatent, le vin se répand, et les outres sont perdues. Mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et le tout se conserve. »

Et on ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres ; autrement, les outres éclatent, le vin se répand, et les outres sont perdues. Mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et le tout se conserve. »
Saint Hilaire de Poitiers
Ces exemples nous sont aussi proposés pour nous apprendre que les âmes, aussi bien que les corps affaiblis par d'anciens péchés, sont incapables de recevoir les sacrements de la grâce nouvelle.

Dans le sens mystique, la réponse que Notre-Seigneur fait ici, en déclarant que ses disciples ne doivent point jeûner tant qu'ils jouissent de la présence de l'Époux, nous apprend la joie dont sa présence est pour nous le principe, et nous rappelle le sacrement où il nous donne une nourriture sainte, nourriture qui ne fera défaut à personne pourvu que Jésus-Christ soit présent, c'est-à-dire qu'on le possède au dedans de soi-même. Mais lorsque l'Époux leur sera enlevé, alors ils jeûneront, car aucun de ceux qui ne croiront pas à la résurrection du Christ, ne mangera le pain de vie, puisque le sacrement où nous recevons le pain du ciel nous est donné comme gage de notre foi en la résurrection.
Saint Jean Chrysostome
Cette question revient à dire : " Soit, vous agissez de la sorte comme médecin ; mais pourquoi vos disciples, laissant là le jeûne, vont-ils s'asseoir à de pareilles tables ? " Pour rendre l'accusation plus forte par la comparaison, ils se mettent en regard, eux d'abord, et puis les pharisiens. Car ces derniers jeûnaient pour obéir à la loi, comme ce pharisien qui disait : " Je jeûne deux fois dans la semaine, " et les disciples de Jean, d'après la recommandation de leur Maître.

Ou bien, si saint Luc place cette question dans la bouche des pharisiens, tandis que saint Matthieu l'attribue aux disciples de Jean-Baptiste, c'est que les pharisiens les avaient poussés à faire cette question, comme ils firent encore plus tard à l'égard des hérodiens. Il est à remarquer que lorsqu'il s'agit de prendre la défense des étrangers, des publicains par exemple, Notre-Seigneur, pour consoler leur âme ulcérée par le chagrin, repousse avec force les accusations dont ils sont l'objet, tandis qu'il répond avec une extrême douceur lorsque le blâme tombe sur ses disciples. Et Jésus leur dit : " Les amis de l'Époux peuvent-ils être dans le deuil pendant que l'Époux est avec eux ? " Il vient de se présenter comme médecin, ici il se donne le nom d'époux, rappelant ainsi ces paroles de Jean-Baptiste (Jn 3) : " L'époux est celui qui a l'épouse. "

Voici le sens des paroles du Sauveur : " Le temps présent est le temps de la joie et de l'allégresse ; il ne faut pas y mêler de cause de tristesse. Car le jeûne est une chose triste, non pas précisément en elle-même, mais pour ceux dont les dispositions sont imparfaites, c'est-à-dire pour ceux qui n'ont pas encore atteint la force de la perfection spirituelle ; car il est plein de douceur pour ceux qui veulent se livrer à la contemplation de la sagesse et travailler à leur perfection. Notre-Seigneur se conforme donc à leurs idées, et il montre par là que la conduite de ses disciples était l'effet non point de la sensualité, mais d'une économie pleine de sagesse.

Le Sauveur appuie de nouveau sa doctrine sur des exemples empruntés à la vie ordinaire : " Personne, dit-il, ne met une pièce de drap neuf à un vieux vêtement, " etc., paroles dont voici le sens : Mes disciples ne sont pas encore assez forts, ils ont encore besoin de condescendance, l'Esprit saint ne les a pas encore renouvelés ; dans cette disposition, il ne faut point leur imposer le lourd fardeau des préceptes. En parlant de la sorte, il trace à ses apôtres la règle qu'ils devront suivre, de traiter avec douceur les disciples qui leur viendront de toutes les parties de la terre.

Le Sauveur nous donne ainsi la raison de tant de paroles simples et familières qu'il disait à ses apôtres, pour s'accommoder à leur faiblesse.
Saint Jérôme
Question pleine d'orgueil, et coupable vanité du jeûne ! Les disciples de Jean étaient inexcusables de s'être joints aux pharisiens que leur Maître avait si hautement condamnés, ils le savaient bien, et qui calomniaient celui qu'il avait annoncé.

L'époux, c'est Jésus-Christ ; l'épouse, c'est l'Église. De cette union spirituelle sont nés les Apôtres, qui ne peuvent pas être dans le deuil tant qu'ils voient l'Époux dans la chambre nuptiale, et qu'ils savent qu'il est avec l'Épouse. Mais lorsque les jours des noces seront passés pour faire place au temps de la passion et de la résurrection, alors les fils de l'Époux jeûneront, comme il est dit : " Viendront des jours, " etc.

Quelques-uns se fondent sur ces paroles pour conclure que l'on doit consacrer au jeûne les quarante jours qui suivent la passion, quoique les jours de la Pentecôte et la descente de l'Esprit saint qui suivent immédiatement, nous apportent de nouveaux sujets de joie. Montan, Prisca et Maximilla prennent occasion des mêmes paroles pour faire le carême après la Pentecôte, en alléguant que les fils de l'Époux doivent jeûner lorsque l'Époux a disparu. Mais la coutume de l'Église est de se disposer à la passion et à la résurrection du Seigneur par l'humiliation de la chair, et de nous préparer par le jeûne du corps à l'abondance spirituelle que les mystères tiennent pour nous en réserve.

Nous pouvons encore entendre par ce vêtement usé et par ces vieilles outres, les scribes et les pharisiens. Ce morceau de drap neuf et le vin nouveau sont les préceptes de l'Évangile qu'on ne peut imposer aux Juifs, dans la crainte d'une déchirure plus grande. Les Galates voulaient faire quelque chose de semblable, en mêlant les prescriptions de la loi avec celles de l'Évangile, et en mettant du vin nouveau dans de vieilles outres ; mais l'Apôtre les en reprit en ces termes : " O Galates insensés, qui vous, a fasciné l'esprit pour vous rendre ainsi rebelles à la vérité ? " Il fallait donc verser d'abord la doctrine de l'Évangile dans le coeur des Apôtres, avant d'en faire part aux scribes et aux pharisiens qui, étant corrompus par les traditions de leurs ancêtres, ne pouvaient conserver la pureté sans mélange des préceptes du Christ. Il y a, en effet, une grande différence entre la pureté d'une âme virginale qu'aucune faute antérieure n'a soufflée, et celle d'une âme qui a traîné dans la fange de toutes les passions.

Ou bien encore, c'est lorsque nos péchés ont forcé l'Époux de s'éloigner, qu'il faut recourir au jeûne et nous abandonner à la tristesse. 
Saint Augustin
Saint Matthieu attribue cette question aux disciples de Jean ; le récit de saint Marc, au contraire (Mc 2), semblerait indiquer qu'elle fut faite par d'autres, c'est-à-dire par les convives, objectant l'exemple des disciples de Jean et des pharisiens ; ce que saint Luc (Lc5) raconte en termes plus exprès. Si donc saint Matthieu s'exprime ainsi : " Alors les disciples de Jean s'approchèrent, " etc., c'est que ces disciples étaient présents, et que tous à l'envi faisaient autant qu'ils le pouvaient, cette objection.

Ou bien encore, tout chrétien qui jeûne convenablement humilie son âme dans les gémissements de la prière et la mortification du corps, ou la détache des séductions de la chair sous le charme d'une sagesse toute spirituelle. Or, le Seigneur embrasse dans sa réponse ces deux espèces de jeûne. Il dit du premier qui tend à humilier notre âme : " Les fils de l'Époux ne peuvent pas être dans le deuil ; " et de celui qui offre à l'âme un aliment tout spirituel : " Personne ne met un morceau de drap neuf, " etc. Mais lorsque l'Époux nous est enlevé, c'est alors qu'il faut pleurer, et notre douleur sera véritable si nous brûlons du désir de le voir. Heureux ceux qui ont pu jouir de sa présence avant sa passion, l'interroger suivant leurs désirs, et l'écouter avec le respect qu'ils devaient à ses divines paroles. Nos pères ont désiré le voir avant sa venue, et ils ne l'ont point vu. Dieu leur avait donné une autre mission : ils devaient annoncer son avènement, mais ils ne devaient pas entendre sa parole, lorsqu'il serait descendu sur la terre. C'est en nous que se sont accomplies ces paroles du Sauveur : " Il viendra un temps où vous désirerez voir un de ces jours, et vous ne le pourrez pas. " Qui donc ne consentira à être dans le deuil ici-bas ? Qui ne dira : " Mes larmes sont devenues mon pain le jour et la nuit, pendant qu'on me dit tous les jours : Où est ton Dieu ? " C'est donc avec raison que l'Apôtre désirait d'être dégagé des liens du corps pour être avec Jésus-Christ.

Saint Matthieu emploie le mottristesse là où saint Marc et saint Luc se sont servis de l'expression jeûner, parce que le jeûne dont parle ici le Seigneur renferme l'humiliation d'une âme affligée, tandis que les dernières comparaisons ont pour objet l'autre espèce de jeûne qui consiste dans la joie de l'âme que les douceurs spirituelles tiennent comme suspendue et détachée des aliments terrestres. Notre-Seigneur nous apprend ainsi que ceux qui sont trop occupés de leur corps et qui n'ont point dépouillé le vieil homme et ses inclinations, ne sont pas capables de cette espèce de jeûne.
Saint Rémi
Par ce vieux vêtement il veut désigner ses disciples, car ils n'étaient pas encore entièrement renouvelés ; ce morceau d'étoffe forte, c'est-à-dire neuve, signifie la grâce de la nouvelle loi, c'est-à-dire la doctrine de l'Évangile, dont le jeûne est une petite partie. Il ne convenait donc pas qu'il leur imposât la loi dure et pénible du jeûne, qui aurait pu les briser par sa rigueur et leur faire perdre la foi. C'est pour cela qu'il ajoute : " Car le neuf emporte une partie du vieux. "

A ces deux comparaisons, celle des noces et celle d'une pièce d'étoffe neuve et d'un vêtement usé, il en ajoute une troisième, celle des outres et du vin : " Et l'on ne met point, dit-il, du vin nouveau dans de vieilles outres, " etc. Ces vieilles outres ce sont ses disciples, qui n'étaient pas encore parfaitement renouvelés ; et le vin nouveau signifie la plénitude de l'Esprit saint et les mystères du ciel, dont les disciples n'étaient pas encore capables de pénétrer la profondeur. Mais après la résurrection, ils devinrent des outres neuves ; ils reçurent le vin nouveau lorsque l'Esprit saint vint remplir leur coeur ; ce qui fait dire à quelques-uns : " Ils sont tous pleins de vin nouveau. "
Rabanus Maurus
Car Jean ne but ni vin, ni rien de ce qui peut enivrer, et le mérite de son abstinence est d'autant plus grand, qu'il n'avait aucune puissance sur la nature. Mais quant au Seigneur qui peut remettre les péchés, pourquoi s'abstiendrait-il de manger avec les pécheurs, puisqu'il peut les rendre plus justes que ceux qui font profession d'abstinence. Jésus-Christ jeûne pour vous apprendre à ne pas éluder le précepte du jeûne, et il mange avec les pécheurs, pour vous faire comprendre sa puissance et l'efficacité de sa grâce.

Quoique ces diverses comparaisons n'aient qu'un même objet, elles diffèrent cependant l'une de l'autre. Le vêtement qui couvre notre corps représente les bonnes oeuvres que nous faisons extérieurement ; et le vin qui nous fortifie intérieurement signifie la ferveur de la foi et de la charité qui renouvelle l'intérieur de notre âme. 
La Glose
A peine Notre-Seigneur s'est justifié de fréquenter les pécheurs et de participer à leurs repas qu'on l'attaque sur l'action de manger elle-même. " Alors, dit l'Évangéliste, les disciples de Jean vinrent le trouver, et lui dirent : Pourquoi les Pharisiens et nous, jeûnons-nous ? " etc.

C'est comme s'il disait : Une pièce d'étoffe, c'est-à-dire neuve, ne doit pas être cousue à un vieil habit, car souvent elle emporte tout ce qu'elle recouvre, c'est-à-dire le vêtement presque tout entier, et la déchirure est plus grande. C'est ainsi qu'en imposant un lourd fardeau à un homme encore novice, on détruit souvent le bien qui existait auparavant dans son âme.

Par là le Sauveur nous apprend que les Apôtres ne devaient pas être retenus captifs des anciennes observances, eux qui devaient être comme inondés des flots d'une grâce toute nouvelle.
Louis-Claude Fillion
Troisième comparaison : Cet exemple est emprunté, comme le précédent, à l’économie domestique. Du reste les trois images s’enchaînent très bien et se complètent mutuellement : la première a parlé de la célébration d’un mariage, la seconde et la troisième poursuivent la même pensée, décrivant l’une les préparatifs de la toilette, l’autre les préparatifs du festin, en vue de cette fête de famille. On ne met pas non plus, à moins d’être insensé, ou du moins irréfléchi au dernier point. - Du vin nouveau, un vin qui sort du pressoir et qui est encore chaud, ardent, qui fermente et travaille avec force. - Dans de vieilles outres ; allusion à la coutume orientale de mettre le vin non en fûts et en bouteilles, mais dans des outres de peau de différentes grandeurs. C’est encore de cette manière que les Orientaux contemporains conservent et transportent la plupart des liquides, spécialement le lait l’huile et le vin. Les outres sont faites le plus souvent en peau de chèvre, quelquefois aussi en peau d’âne ou de chameau. On met en dedans le côté extérieur de la peau, et en dehors la partie interne après l’avoir enduite de poix pour bien fermer les pores. Un vin nouveau enfermé dans de vieilles outres les presse et les gonfle de toutes parts ; mais comme elles ont perdu leur première élasticité, il leur est impossible de résister à la pression, et elles éclatent : les outres éclatent, le vin se répand, ce qui produit une ruine complète des deux objets. - Mais on met le vin nouveau dans des outres neuves... Dans ce cas, il n’arrive aucun accident regrettable, car l’outre neuve, pleine de souplesse, résiste sans peine aux efforts du vin. - Nous nous sommes contentés d’exposer la signification littérale des deux dernières comparaisons : il nous reste maintenant à voir quelle application elles peuvent trouver dans le sujet traité par Jésus. Plusieurs auteurs, il faut bien le dire, sont tombés dans un erreur singulière en croyant et en affirmant que les vêtements usés ou les vieilles outres figuraient les Apôtres, tandis que l’étoffe crue et les outres neuves représentaient les maximes sévères, les rigoureux préceptes du Christianisme ; d’où ils concluaient que, les Apôtres étant encore trop faibles pour jeûner et pour mener une vie mortifiée, Jésus les en dispensait momentanément, de crainte de les perdre eux-mêmes et de gâter son œuvre, s’il exigeait trop d’eux pour commencer. Tertullien déjà s’égarait de la sorte, Cf. son traité contre Marcion, 4, 11 ; de même Théophylacte après lui. Maldonat lui-même, d’ordinaire si judicieux dans sa critique, s’est laissé dérouter sur ce point : »Si Jésus avait prescrit à ses disciples encore faibles et formés aux mœurs d’autrefois un genre de vie trop rigide, dans le but de les rendre meilleurs, ce que, selon vous, il aurait dû faire pour les sanctifier, il les aurait rendus pires en les rebutant, et en les détournant de la voie du salut ». Comme si la première démarche que Jésus avait exigée de ces novices, au moment de leur vocation, n’avait pas consisté à tout quitter pour le suivre ! Comme si des hommes qui s’étaient attachés à lui au point d’en venir, sur un seul mot, à un tel renoncement, eussent hésité à faire, s’il l’eût désiré, ce que ni les Pharisiens, ni les disciples du Précurseur ne trouvaient bien difficile ! Non, il ne faut pas rapetisser ainsi la pensée du Sauveur, en transformant une grave question d’institutions en une mince question de personnes. Plusieurs Pères avaient cependant très bien indiqué le véritable sens, spécialement Origène, S. Basile, Hom. in Ps 32, S. Isidore, S. Cyrille, S. Hilaire et S. Augustin. Citons quelques mots de ces deux derniers Docteurs : « Il dit que les Pharisiens et les disciples de Jean n’accepteront pas les choses neuves à moins de devenir neufs », S. Hil. in h. l. « Par vieilles outres nous devons entendre les Scribes et les Pharisiens. L’étoffe du nouveau vêtement et le vin nouveau ce sont les préceptes évangéliques que ne peuvent supporter les Juifs sans que ne s’opère une grande déchirure. Les Galates désiraient quelque chose de semblable quand ils mêlèrent les préceptes de la Loi avec l’Évangile, et mirent le vin nouveau dans les vieilles outres, S. August. Quaest. Evang. 2, 18 ». Mais on peut parler en termes plus clairs et plus précis en réunissant toutes les idées des anciens auteurs sur ce point délicat. Les vêtements usés, les outres vieillies représentent, non seulement les Pharisiens et les disciples de Jean-Baptiste, mais tout le système religieux auquel ils appartenaient, c’est-à-dire la théocratie de l’Ancien Testament, et en particulier cet ensemble de traditions et de pratiques sévères, qu’on aurait voulu imposer à Jésus et à ses Apôtres. Au contraire, l’étoffe neuve et le vin nouveau figurent l’esprit généreux que l’Évangile devait apporter au monde. Or, que proposait-on au Sauveur dans la circonstance présente ? De conserver des choses surannées, tout en essayant de les rajeunir tant soit peu. Il s’y refuse à bon droit, ne voulant pas rattacher la Loi nouvelle à l’ancienne comme une pièce d’étoffe supplémentaire sur un vieil habit. Son œuvre sera complètement une ou elle ne sera pas ; et c’est le triste oubli de cette vérité qui, peu de temps après la mort de Jésus, créa un schisme dangereux dans l’Église primitive, les Judaïsants prétendant encore rapiécer le Mosaïsme à l’aide du Christianisme. C’est pour cela que les Apôtres ne pouvaient pas encore jeûner. Les jeûnes multiples des Pharisiens et des Joannites formaient une partie intégrante de la religion du Sinaï ; mais la religion du Sinaï devait, en se transformant et en se régénérant, faire place à celle de Jésus-Christ. Il ne fallait pas qu’on pût confondre celle-ci avec celle-là, surtout au début, mais que celle-ci apparût immédiatement avec son caractère distinct, autrement le Christ n’eut fait qu’un rapiéçage inutile. Un mélange de deux esprits très divers eût jeté le trouble et la confusion dans l’âme des premiers disciples et les eût rendus incapables du rôle auquel ils étaient destinés. Plus tard, quand leur formation aura été complétée par la descente de l’Esprit-Saint, l’inconvénient signalé n’étant plus à redouter, ils pourront jeûner sans crainte. Pour le moment il y aurait eu un grave danger soit pour eux, soit pour la doctrine évangélique, à composer leur vie intérieure à l’aide d’éléments hétérogènes ; elle ne pouvait prospérer qu’à la condition d’avoir été coulée d’un seul jet. - Bien que les deux allégories des vv. 16 et 17 aient au fond le même sens, la seconde dit pourtant quelque chose de plus que la première ; car il est remarquable que Notre-Seigneur Jésus-Christ ne se répète jamais purement et simplement : alors même qu’il semble le faire, il ajoute toujours à sa pensée quelque trait nouveau, ou bien il la présente sous une autre face. Le symbole des vêtements est plus extérieur, celui des outres a quelque chose de plus intime. « Si le vin nous refait intérieurement, le vêtement nous couvre extérieurement »,Vén. Bède. La première image peut s’appliquer aux doctrines, la seconde aux esprits des deux Testaments. La première dit seulement que ce qui est neuf ne saurait être cousu sur le vieux sans plus de façon, la seconde qu’un esprit entièrement nouveau réclame des formes entièrement nouvelles.
Fulcran Vigouroux
Des outres. Les Orientaux se servent d’outres de peau de chèvre, de chameau ou d’âne pour conserver le vin et les autres liquides.